Voilà venu le grand jour, tant redouté par la petite enfant apeurée. Effrayée par le monde qui n'appartient pas au silence, elle s'est bien gardée d'être vue à ce jour. Elle qui s'est terrée dans le mensonge de réalité depuis ces quelques jours, elle compte enfin sortir au grand jour. Non pour rayonner, car les ailes de la perdition sont son adage, et elle a peur de la foule ... La vérité est que Lyra à grand peur du contact, elle se sait hantée par ces hommes mauvais qui lui ont tout prit. Elle aimerait se bercer à nouveau d'illusions, de ces beaux rêves enfantins, faire des bonnes rencontres et tendre en ces affections qu'on lui a si longtemps refusées. En un mot, elle ne voudrait qu'un bonheur mais elle a peur de tout et surtout de blesser les gens. Voilà son cauchemar, celui d'assainir une nouvelle citadelle ... Et alors qu'elle a trouvé refuge en cette terre d'abondante félicité, elle croit encore être cette menace monstrueuse. Ainsi elle prend le petit temps de coquetterie pour se vêtir de bon usage. Le directeur, seul personne en cette heure à connaitre son existence, car sur sa chambre le nom de la jeune fille n’apparaît pas, son cagibi en est verrouillée ; il lui a remit un uniforme d'enfant, et elle exalte telle un bourgeon en fleur sa ravissante petitesse. Elle se veut aimante de cette couleur approchant l'émeraude, et frétille de plaisir à tournoyer sur elle-même, chassant ainsi son anxiété néfaste.

Aussi portant ses petits pas chastes aux foulées élancées et gracieuses, elle ramasse son cartable qu'elle porte à deux mains, car sa force pittoresque lui impose cette directive drastique. Lyra est si faible et fragile, un petit corps chétif mais si envié de douceur. Et l'angélique se faufile hors de sa chambre, sortant toute entière après avoir vérifié que personne ne sois en vue. Et laissant sa silhouette s'élancer à toute vitesse dans le couloir du deuxième étage, elle craint d'être découverte. Sa chevelure rêche et brune ballote dans le vent coupé par son frêle corps. La petite démone gravit en digression les chemins de traverse et fuit la bâtisse de sa phobie humaine, les gens ... Enfin elle s'arme de courage une fois au-dehors, libre de souffler un petit coup son soulagement étouffé, elle prit donc le sentier qui prône vers le lycée ... Sur la route, elle peut souffler et se relâcher d'être seule. Se perdant en rêverie, elle ne remarque pas la fin du voyage. Et et aux détour du sentier elle se colle au mur d'enceinte, qui fait sorte de rempart. Elle le rase en bonne ombre silencieuse et invisible, la demoiselle à la robe du majestueux corbeau s'infiltre sans bruit au coeur de la cour. Là elle rive son regard d'enfant crédule et intéressée sur un couple. Elle les suit discrètement et les voyant s’engouffrer dans le gymnase, d'où d'une gueule brillante s'échappe le vacarme des festivités, elle frémit. Le coeur tambourine et la serre à la poitrine, elle est étouffé de la main noire qui est sa phobie, la peur du ridicule et des médisances. Et se donnant un petit coup en gloussant elle s'avance à cette porte, elle ne perçoit que la percussion des graviers sous ses chaussures et pourrait bêtement tomber.

Enfin elle presse d'une petite force la poignée, qui s’abaisse et découle d'un mécanisme d'ouverture lente, la porte crisse et elle attire des regards déjà terriblement intimidants. Là tressaillant dans ses chaussures, elle force de tout son corps accoudé à la porte pour s’engouffrer à son tour dans le lieu bruillant. Et elle se dépêche, mélange d'angoisse et de frayeur native pour ses regard qui la transperce, elle se débine en empotée et trébuche sur son cartable après l'avoir bêtement lâché. Et elle laisse échapper de sa belle bouche un petit cris dans sa chute grossière et en retentit un fugace fracas de cuir et de sangle. La tête écroulée ou affalée sur le cartable noir, le corps échoué en bêtise sur le sol lisse mais bien dur pour elle, elle aimerait geindre mais ne le doit pas. Elle aimerait se peindre d'être si fragile, comme une feuille, comme un nouveau né ... Mais voilà elle ne doit pas faire de vague et elle reste là sur le fil suspendu où personne ne la vue, ce qui la rassure. Car cette pauvre enfant ne saurait repousser l'assaut de la honte qui la dévorerait intégralement ...