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 Des tics et des tacs de temps les étangs sont teintés

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Greg Ogramann
Greg Ogramann
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MessageSujet: Des tics et des tacs de temps les étangs sont teintés   Des tics et des tacs de temps les étangs sont teintés I_icon_minitimeDim 16 Fév - 4:33

Gris. Le monde était gris. Sans couleur et sans odeur, il s'étalait sous ses yeux comme une fade carte postale. La table était grise. Le sol était gris. Ses habits étaient gris. Lui-même était gris.
Il contemplait sa main, mollement posé sur le bois de la table. Un crabe gris sans vie. Incrusté sous un de ses ongles rongés au sang, un peu de couleur. Marron. Terre de dehors. Sa paume s'était enfoncée dans l'herbe mouillée, il s'en souvenait. Juste avant qu'il ne glisse. Qu'on le rattrape. Qu'on le ramène.
Mais le marron même devenait gris dans cette pièce. Cette terre séche s'effritait sous l'ongle, ne serait plus que poussière morte dans quelques jours. Quelques heures. Quelques pillules. Souvenir ou rêve, il ne saurait plus.

-Ce n'est plus possible.

Le tic-tac de l'horloge égrenait les secondes, morne rappel d'un présent maussade. Le son même de leurs voix était gris. Plus d'émotions. Juste des mots lachés dans l'air qui tentaient de s'envoler puis s'effondraient au sol. Pas d'R sous leurs L. Pas de sens dans leurs phrases. Comment voler alors que le temps même agonisait d'ennui ?

-C'est la cinquième fois que tu essaies de retourner à la maison.

Il essaya de se concentrer encore une fois. C'était important. Il le savait. C'était ses parents quand même, devant lui. Dans cette salle. Sa mère qui parlait, prononçait ces syllabes qui tentaient de s'intercaler entre les tic et les tac du temps trépassé. C'est la cinquième fois. A la maison. Il était sorti, oui. Pour rentrer chez lui. Les piqures. Les médicaments. Les camisoles. Les voix. Les fous. Les gardiens. Il fallait qu'il en sorte avant de devenir plus fou encore.
Sa main vola vers sa tempe pour contenir un éclat de rire suraigu sous son crâne. Le fragment de pensée avait traversée la brume grise qui régnait jusque sous son crâne. Kristel – oui, son nom était Kristel – sursauta sur sa chaise, prête à reculer. Nouvelle percée dans la brume. Douleur. Ou honte ?

-Gregory, ça ne peut plus continuer.

L'éclair de sentiment redisparut aussi vite qu'il était apparu. La femme avait sursauté. Sans doute un tic plus fort qu'un tac. Des tic et des tacs de temps les étangs sont teintés, comme il l'avait lu. Ou dit. Ou inventé ? Qu'importe. Un souvenir-rêve peut-être, d'un gris commun. Gris comme l'eau des étangs probablement, gardant dans leurs profondeurs les époques révolues et mortes qui ne reviendront jamais. La vase même au fond devait disparaitre sous cette éternité molle et devenir fade et dure comme un fossile. Résidu de vie.

-Greg...

Il releva la tête à l'écoute de cette voix grave. Du noir tirant sur le gris, Burckhard, papa.  Greg. Gregory. Greg. Gregory. Les sons résonnaient sous son crâne. Greg. Gregory. C'était lui. Il était deux alors. Greg et Gregory. Ou plus. Ce n'était pas deux mots. Mais des sons. Des syllabes. Des lettres. Des sens. Des  choses.  Décomposition. Greg. Gres. Haut. Go. Ri. Gray. Gue. Grrrrrrr. Eh. Gore. Y. Cubes emboités et matrioschka, l'un dans l'autre tout s'emboitait jusqu'à ce que le grand se cache dans le petit et qu'il se retourne, inversant le revers des envers vers l'avers. Ca ne voulait plus rien dire. GREGORY. Six lettres. Gorger. Qui a mieux.

-Ecoute nous enfin !

Le bois claqua sous le choc, éclaboussant le gris de la table de couleur. Du bruit. De la vie. Sous son crâne d'autres voix répondirent en échos lointains. Non. Son regard vide se fixa sur les yeuxgris -non, verts - de sa mère. Il devait écouter, surfer sur la vague de gris sans s'y laisser couler. Juste surnager au dessus des autres sans s'envoler, coincé entre ciel et mer.

-Nous déménageons Gregory. Nous changeons de ville.

Dé. Mais. Na. Joncs. Les mots s'alignèrent et tourbillonnèrent, avant qu'ils ne réussissent à les remettre en ordre. Déménageons. Changeons de maison. Partons...
Lumière dans le gris, et un coin de ses lèvres se releva. Partir. Dehors. Revivre comme avant. Tous les trois. Alors pourquoi les yeux verts – oui, ils étaient bien verts ! - le fixaient ils de façon si brillante ?

-Nous, c'est ton père et moi.

Nous-ton-moi. Mais nous c'était eux et lui non ? Papa-maman-fiston, le saint tryptique. Comme avant. Tous les trois, dans leur petite vie. Les yeux verts l'évitaient. Les yeux bruns luisaient. Pourquoi ? Ils ne devaient pas. Nous, c'était -

-Tu restes ici Gregory.

Tic.
Pourquoi.
Tac.

-Pourquoi...

C'est désormais la voix presque noire qui répondit:  "Tu n'as rien fait de mal. Rien. C'est juste que ce n'est plus supportable, cette vie. Pour toi comme pour nous. Tu dois rester ici pour te faire..."

Tac finit la phrase. Rien. Rien fait de mal. Ce n'était pas ce qu'il avait fait. Mais ce qu'il était.

-C'est pour ton bien...

S'ils partaient sans lui, c'était parce qu'il était ainsi. Parce qu'il était lui. La brume des médicaments s'effilochait, laissant transparaitre des éclats de voix, d'émotions, de sensations. Le bois rêche sous ses doigts. Les sanglots étouffés de l'autre coté de la table. Son estomac qui se comprimait. L'odeur âcre du désinfectant. L'eau sur ses joues qui dégoulinaient. Cette pression sur sa tête, dans sa tête.

-Je suis désolée Gregory...

Echo dedans, émergeant du maelstrom de mots interne.
Je suis désolée Greg...
Trop de voix. Trop d'informations. Trop de douleur.

Ses pieds s'ancrèrent dans le sol, voulurent repousser sa chaise. En arrière, loin d'eux – puisqu'il n'y avait plus de nous. Abandon. Juste... abandon. Rejet. Il n'était plus qu'un étranger désormais. Il était exclus du "nous", de la famille, et pour cause. Il n'était d'autre qu'un détritus d'une vie passée qu'on devait enfouir, comme ce temps au fond des étangs. Erreur. Anomalie. Monstre.
Mais ses pieds restèrent sur place. Ses parents. S'ils n'étaient plus là... Si eux le fuyaient... que lui restait il ? Rien.

-Comprends-nous...

D'autres larmes. Des sanglots. Mais de rire. "Comprends nous". Si seulement il ne le faisait pas. Si seulement il ne les avait pas en tête. Qu'il pouvait ignorer être un monstre. Il aurait tant voulu s'aveugler et prétendre qu'ils ne l'aimaient pas. Tant voulu ignorer leur odieuse compassion et juste leur sauter à la gorge. Hurler, enfin. Hurler qu'il n'avait pas demandé à naitre comme ça. Pas demandé à être un monstre. A être abandonné de l'humanité d'abord, d'eux ensuite. Sauter sur eux et mordre, cogner, faire mal, autant que ce que lui souffrait en les voyant fuir son existance.

Si seulement il ne les aimait pas.
Si seulement il ne les haissait pas.

Ses pieds tremblèrent. Sauter. Reculer. Attaquer. S'enfuir. Comment la haine et l'amour pouvaient-ils coexister ainsi ? Ses dents s'enfoncèrent dans sa lèvre inférieure alors qu'il tentait de contenir cet hideux mélange. Tristesse et désespoir combattaient la rage aveugle, luttaient afin de controler son corps. Il en tremblait. Muscles contractés. Fer sur sa langue, alors que ses dents brisaient la fine couche de peau. Et encore ces mots désormais porteurs de trop de sens qu'ils lâchaient. Ces mots qui désormais pénétraient ses méningent et alimentaient sa N. Chacune de leurs paroles n'était que vérité en apparence et mensonge en fond. Ils ne l'aimaient pas. Ou plus. Ils avaient peur de lui. Voulaient fuir. Il les détestait.

On ne doit pas détester ses parents...

Dans son esprit, une Bête aux relents d'encre s'ébroua, repue, l'estomac plein de ressentiments et son corps arrêta de trembler. C'était fait. Le gris reprenait ses droits. Qu'ils partent ; peu importait après tout. Il avait toujours été seul. Plus de larmes. Elles étaient parties dans le gris. Pas de regret à avoir pour un état de fait. Non, deux états. Il les aimait et il était seul.

-Ca ira.
-Tu comprends, ce n'est pas que...
-J'ai dit : ça ira.

Le soulagement se disputait à la honte sur le visage de Kristel alors qu'elle le sondait de ses yeux gris, tentant de percevoir ses émotions. Son père, lui, se captiva pour l'examen de sa montre aux reflets ternes plutôt que de réaffronter le regard de son fils.

-C'est tout ?

Tic.
Tac.

C'était tout. Ne restait que le tic tac de la pendule.

Le gardien revint le chercher pour le ramener dans sa chambre. Chez ce qui devrait être chez lui désormais. Son univers de béton gris et froid personnel. Il se leva et le suivit sans mot dire. Ses parents le suivirent, restant un peu écarté de lui alors que l'homme refermait la porte de la salle de visite.

Il jeta un oeil distrait à ses ongles en repartant vers son chez lui. Grise. La terre n'était que poussière. Aussi grise que ce couloir. Et aussi grise que les échos qui rebondissaient faiblement sur les murs de béton.

"Il l'a bien pris, non ?"

Tic.
Tac.
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