Noïd était, une fois n'est pas coutume, dans la bibliothèque, en train de lire bien sagement un bouquin sur la philosophie et méditait ce que disait l'auteur. L'auteur définissait le concept de liberté par une absence de contraintes et de poids sur soi.
L'ange déchu buta sur cette formulation.

- « ...Mouais, bof. », finit-il par lâcher avec un soupir. Si la liberté pouvait se caractériser aussi simplement, on le saurait. Une personne libre qui se fixait elle-même, en son âme et conscience, des choses auquel elle se pliait n'était-elle pas libre pour autant ? Tch, c'était avec ce genre de logique à la con que l'on créait des tarés qui se croyaient tout permis.

VLAN ! Noïd, de surprise, manqua de lâcher son livre. Un coup violent venait d'être asséné sur la table, si fort qu'il l'avait fissuré. Le propriétaire du poing qui était encore sur la table était un mec, assez baraqué, qui tenait un ouvrage sur le combat dans sa main gauche. Le genre de barbare que tu croise par dizaine au lycée Yokai, surtout quand tu t'appelles Noïd Ochita et que tu as tabassé sensiblement le tiers d'entre eux à toi seul.
L'ange aux cheveux blancs leva un regard agacé vers lui, plantant sans la moindre trace de frayeur son regard rouge vif dans celui bleu clair de la brute.

- « C'est à quel sujet ? », dit-il, sans chercher à cacher l'irritation qui commençait à grimper en lui. Il posa son livre sur la table, et le referma d'un coup sec. Le type qui le regardait ne semblait pas du tout impressionné par cela. Au contraire, il dévisagea Noïd avec un air d'un type qui évalue la qualité d'une marchandise.

- « C'est toi, Noïd Ochita ? La tapette aux cheveux blancs ?

- Je présume... Et que me veux un crétin patibulaire aux cheveux décolorés et qui porte des vêtements tellement nazes que j'en voudrais pas pour essuyer mes chiottes ? », répondit d'une traite la tapette en question, ne semblant pas perturbée par la tirade de l'autre.

Il tiqua sous l'insulte, mais choisi d'essayer de la jouer fine.

- « Hum, je vois que tu aimes lire... « Ess...ai, de philo...sophie. L'analyse de la... liberté. ». Mwahaha, c'est quoi ce truc ! Grosse tarlouse !

- Hum, tu m'impressionnes, honnêtement. », dit tranquillement l'ange déchu en jetant un œil à la revue que tenait l'autre.

- « Quoi ?

- Oh, je vois seulement qu'il y a des lettres sur ton truc. Vu la fluidité avec laquelle tu as lu ce simple titre... Je m'attendais à ce que tu choisisses un livre d'images. C'est courageux, d'essayer d'apprendre à lire, à ton âge. Tu peux être fier. »

C'en était trop. Le poing de l'inconnu vola vers la mâchoire du déchu. Celui-ci l'intercepta en route, tira en arrière pour entraîner le barbare. Lorsqu'il fut à son niveau, il lui saisit la tête et la cogna sans ménagement sur la table, dans un CRAC, qui retentit. Il tomba par terre et ne bougea plus. Noïd ne s'y intéressa plus du tout, ramassa son livre de philo, et entreprit d'aller le ranger. Sans se préoccuper du regard estomaqué des autres élèves, Noïd chercha dans les rangée ou il avait trouvé ce foutu bouquin. Ce fut là qu'il se prit sur la tête deux épais volumes qu'une personne maladroite venait de faire tomber en percutant de l'épaule l'étagère.
Irrité, il se frotta la tête, et se tourna vers le responsable.

- « Rrrrh, fais un peu attention ! », maugréa-il. Oh, merde. Une fille. Et plutôt mignonne en plus.

Bibliothèque. Elle avait finit les cours tôt aujourd'hui, et ne s'en plaindrais pas. Seulement elle n'avait rien à faire dans l'immédiat. Peut-être ses devoirs ? Naaaah. Trop fatiguée. Et si elle allait faire un tour à la bibliothèque, histoire de trouver un bon livre à lire ? Evidemment pour ce genre de chose, la petite sorcière n'avait jamais la flemme.

Elle n'avait que rarement eut l'occasion de passer à cette bibliothèque. Les cours, ses livres qu'elle avait déjà, et puis franchement... Le lieu ne l'avait jamais inspirée plus que ça. Elle avait fait la visite de l'école lors de son arrivé, et y était donc passé. C'était loin d'être la plus jolie, la plus clairs aussi, qu'elle avait pu rencontré. Elle qui d'habitude adorait ce genre d'endroit, s'était résignée à ne pas y aller. Mais finalement, aujourd'hui, elle était d'une positivité à toute épreuve, aussi s'était-elle dit que peut-être en y repassant, elle changerait d'avis. Il était vrai aussi que le jour de son arrivé ici, elle n'était pas très heureuse d'être la. Peut-être que ses mauvais sentiments lui avait donné une impression désagréable...

Quoi qu'il en fut, elle se retrouva entre les étagères recouvertes de livres à peine dix minutes après la fin de son dernier cours. Mathématique. Quelle plaie.

Elle regarda le plan de la bibliothèque, ne sachant pas trop par ou aller, ce qui allait l'intéresser. elle était plutôt grande dans ses souvenirs, mais en effectuant un tri rapide des étages et des coins ou elle n'irait jamais, elle devint soudainement beaucoup plus petite. Pour son premier livre, elle décida de s'orienter vers la magie. Elle se demanda d'ailleurs, ce que pouvait regrouper de tels livres, car dans des bibliothèques normales, tout ceci ne serait que ... Fable. Elle regretta presque de n'avoir pas penser à cela avant. Peut-être lirait-elle des choses intéressante... Mais ... Pourquoi faire ?

Elle survola l'étagère du regard. Elle pencha la tête et commença à lire les titres. Mais elle se stoppa rapidement lorsqu'elle entendit un bruit monstre quelques mètres plus loin, elle en sursauta même. Logiquement dans une bibliothèque, on n'est censé entendre que des murmure, et encore. Alors pourquoi entendait-elle très distinctement deux élèves qui semblait pourtant assez éloigné ? Elle croisa e regard d'un autre élève, aussi éberlué qu'elle, mais la curiosité se faisant trop grande, il s'empressa d'aller voir ce qu'il se tramait. Jimena trouva malsain cette curiosité. Deux élèves qui se chamaillaient... Nouveau grand bruit. Qu'avait-il ... Fait ? Elle ne voulait pas savoir ! Non !

elle resta planté la, devant ses livres de sorcelleries. L'envie de rester ici était parti aussi vite qu'elle était venu. Cette ... "bagarre" car elle supposait que c'en était une, lui rappela ou elle se trouvait exactement et ce qu'il se passait ici, assez fréquemment. Combien ces lieux étaient dangereux pour elle. Voilà pourquoi le plus souvent elle ne s'attardait pas trop en dehors de sa chambre.

Comme prise de panique, elle voulut sortir de la bibliothèque maintenant. Elle se hâta sans trop faire attention à ce qu'il se passait autour d'elle. C'est en tournant trop rapidement dans un rayon qu'elle percuta une étagère, faisant tomber deux livres sur la tête d'un élève. Il pesta.

La voix ne lui était pas tout à fait étrangère ... Mais elle n'y accorda pas plus d'attention que cela. Elle se tourna vers lui et découvrit un ... Albinos. Cheveux blancs, yeux rouges, peau blanche. Elle n'en avait jamais vu auparavant, tout du moins en vrai. Etrange mais pas moche, vraiment pas moche. Elle resta un moment interdite, ne s'attendant pas à tomber sur quelqu'un comme lui, puis elle finit par s'excuser.

"Pardon, j'ai pas fait exprès !"

Elle s'approcha et se baissa pour attraper les livres. Ils étaient plutôt lourds... Elle releva la tête vers lui, inquiète.

"Je ... Je t'ai pas trop fait mal... ?"

Elle se mordit la lèvre tellement elle avait honte, quelle maladroite ! Elle ne remarqua même pas les quelques élèves autour d'eux, les épiant, ou plutôt, l'épiant lui. Elle se contenta de regarder les cotes des livres pour les remettre à leurs place. Et lorsqu'elle les trouva ... Même sur la pointe des pieds elle ne réussirai pas à les replacer... Elle regarda en l'air en se demandant quoi faire pendant un instant. Vraiment ce qu'elle pouvait être bête.

Noïd, vaguement halluciné regarda la fille qui faisait à peu près deux têtes de moins que lui et qui le regardait avec un air... penaud ? L'ange déchu se posa sérieusement, pendant une seconde, la question de comment-il était censé se mettre en colère contre une jeune fille comme ça. Mais la douleur qui irradiait de son crâne le ramena brutalement à la réalité. Il allait avoir une belle bosse, ça c'était sur. Noïd darda son regard rouge vif, assez irrité, vers la personne qui venait de provoquer la collision de deux livres assez lourd sur sa tête.

"Pardon, j'ai pas fait exprès !"

Essayant de contenir son irritation, Noïd passa sa main sur sa tête, ou il sentait déjà la bosse se former. Non, ne surtout... pas s'énerver. Tu ne vas pas pousser une gueulante sur une môme, quand même ? Massant son crâne, il considéra, interdit, la jeune fi...femme ? Oh punaise, c'était pas une gamine, en fait ? C'est clair qu'elle faisait un peu... pâle figure à côté des grosses brutes (lui compris) du lycée Yokai, mais c'était certainement une étudiante, elle aussi.

"Je ... Je t'ai pas trop fait mal... ?"

Elle semblait inquiète. Noïd mit quelques secondes à comprendre que c'était pour lui, qu'elle s'inquiétait. Qu'elle espérait vraiment ne pas lui avoir fait mal. C'était tellement rare que quelqu'un s'inquiète pour lui qu'il resta scotché sur place, pendant une semi-secondes. Depuis Bruna, pas une seule personne n'avait essayé de le faire. Il fallait dire que... Il n'était pas le genre de personne pour qui on s'inquiétait. La majorité du temps, les gens étaient plutôt du genre à avoir peur de lui, et à s'inquiéter pour les gens qui provoquaient sa colère.

- « J'ai connu pire. Tch. », répondit l'ange déchu, qui avait la tête qui tournait. Il faut quand même avouer que même après avoir reçu plus de cent cinquante coup dans la tronche depuis son entrée au lycée, le choc de ces deux putains de bouquins suffisait le mettre dans les vapes. Faut croire qu'il avait la tête moins dure que ce qu'il croyait.

La gamine-qui-n'en-était-pas-une leva la tête, tenant dans ses bras les deux livres qui devaient être franchement trop lourd pour elle, et regarda le sommet de l'étagère d'un air perdu. Eh oui, quand tu fais un mètre trente les bras levés et que les bouquins sont au dernier étage de l'étagère, ben tu galère. Noïd poussa un soupir, légèrement blasé. C'est clair qu'elle n'avait aucune chance en s'y prenant comme ça. Sans se préoccuper de paraître violent, il ôta un peu brusquement les livres des mains de la jeune fille qui lui faisait face.

- « Laisses-moi faire. », grommela-il. Mesurant nettement plus que l'inconnue, Noïd eut beaucoup moins de difficulté à remettre les livres dans leurs rayon. Ce fut le moment que choisit la bibliothécaire pour venir les voir. Elle connaissait Noïd, vu le nombre de fois ou des crétins étaient venus chercher des embrouilles avec lui au sein de sa bibliothèque, et qu'il les avait démoli sur place, son manque de patience naturelle étant ce qu'il est.

- « Monsieur Ochita, une fois de plus, je ne vous signalerai pas pour avoir violenté un autre élève, mais veuillez quitter cette bibliothèque, votre camarade et toi êtes... bien trop bruyant. »

Noïd leva un sourcil. C'est vrai que la règle d'or d'une bibliothèque est de garder le silence. Bon, manque de bol, ce n'était pas vraiment une de ses qualités, mais de là à attaquer directement la jeune fille... Ah. Noïd réalisa un peu tard qu'elle avait du être associée à tort avec lui. Quand la bibliothécaire disait ce genre de trucs, ça ne servait à rien d'essayer de la faire changer d'avis. Poussant sa camarade d'infortune vers l'extérieur, Noïd réprima un bâillement. A cause de l'autre ahuri, il n'avait même pas pu emprunter de livres. Monde de merde.

- « Rah, bientôt, ça va devenir un crime de se défendre. », ragea le déchu. « Bon bah... désolé de t'avoir entraîné avec moi. Si ça t'intéresse, je suis Noïd Ochita. Ah, et sauf si t'as pas peur des abrutis qui me tournent autour, je te déconseille de rester à côté de moi. »

Il était sincère. Noïd ne supportait pas d'emmener d'autres personnes dans sa merde à lui. Car forcément à gérer à lui seul la majorité des bagarreurs de ce lycée... Il était seul. Très seul, car peu de personnes s'approchaient d'une brute qui était prise pour cible par tous les délinquants d'un lycée. Et lui détestait qu'une personne prenne les coups à sa place.

Elle avait pensé à utiliser son maigre pouvoir pour faire voler les livres là-haut. Mais elle avait déjà du mal à faire léviter une pomme plus de trente secondes, alors ses gros livres... Il était inutile qu'elle s'assomme elle-même... Elle s'imagina prendre ses gros bouquins sur la tête et se dit qu'elle avait vraiment du lui faire mal à se pauvre garçon. Il finit par presque les lui arracher pour les remettre à sa place. Elle se recula pour ne pas plus le déranger, sentant son irritation. Elle le regarda un instant, il avait l'air en effet assez contrarié... Elle allait s'excuser à nouveau mais la bibliothécaire elle-même les interpella. Allait-elle se faire taper sur les doigts simplement parce qu'elle avait fait tomber deux livres ?

Étonnamment, ce n'est pas à elle comme elle s'y attendait qu'elle s'adressa.

"Monsieur Ochita, une fois de plus, je ne vous signalerai pas pour avoir violenté un autre élève, mais veuillez quitter cette bibliothèque, votre camarade et toi êtes... bien trop bruyant."

... Cette phrase était pourtant explicite, cependant Jimena eut toute les peines du monde à lui donner un sens. "une fois de plus", "violenter un élève", "quitter cette bibliothèque", Quoi ? Pourquoi il la poussait maintenant ? Mais qu'est ce qu'il faisait ? La jeune fille avait envie de protester mais dans sa grande timidité rien ne sortit vraiment.

"Eh mais ... !"

Elle se laissa faire, docile, presque trop. Cela l'agaçait. Elle remarqua les visages qui se tournaient vers eux. Pourquoi les regardait-on ainsi...

"Mais pourquoi ..."

Non. C'était lui qu'on fixait. Elle n'entendait pas ce qu'il se disait, mais elle finit par comprendre, enfin. Elle se trouvait avec celui-là même qui lui avait fait fuir la bibliothèque. Et... Elle venait de passablement l'assommer avec deux bouquins. Mais devait-elle pour autant prendre peur ? Crier à l'aide ? Il est vrai qu'il n'avait pas l'air commode, mais si vraiment il avait voulu lui faire du mal, il l'aurait fait entre les étagères, peut importe ou il se trouvait, étant donné qu'il l'avait fait à peine deux minutes avant. L'envie lui reprit de s'excuser à nouveau. Mais il s'excusa avant. Il se présenta même. Elle regarda de nouveau autour d'elle, deux ou trois élèves les regardaient encore, elle reconnut même celui dont elle avait croisé le regard, peu de temps auparavant. Mais elle avait du mal à saisir quelle expression s'affichait sur son visage. De la peur ?

Elle demanda doucement:

"Alors... Tout à l'heure, c'était toi ?"

Elle affirmait ça sans crainte, elle voulait simplement une ... Confirmation. Un fauteur de trouble. Hum, ce n'était pas le genre de fréquentation qu'elle aimait avoir, même si c'était pas vraiment par choix qu'elle était avec lui en ce moment. Elle releva la tête vers lui, il ne la regardait même pas, il fixait droit devant d'un air sérieux. A première vu il n'était pas plus effrayant qu'un autre ici... A vrai dire il s'était même excusé de la faire sortir de la bibliothèque. Ce qui en soi ne la dérangeait pas trop puisqu'elle voulait en sortir après ce qu'il s'était passé ... Mais c'était lui qui en était la cause... Raaaah quel casse-tête !

Tellement au prises de ces pensées, elle percuta de nouveau quelque chose, mais cette fois-ci ce fût un autre élève. Elle se tourna vers lui et s'excusa rapidement, légèrement gênée, mais celui-ci ne prit même pas la peine de se retourner, marmonnant simplement quelque chose d'inaudible. Elle soupira un peu. Ces propres réactions l'agaçaient parfois. Et sa maladresse aussi.

La jeune femme, qui n'avait toujours pas dit son nom, le regardait, alors que lui-même regardait les alentours histoire d'être certain que personne ne venait lui chercher des noises alors qu'il était avec elle, car à coup sûr elle risquerait de se faire entraîner. Néanmoins, lorsqu'elle lui parla, il se força à la regarder de nouveau, sans ciller. A cause de lui, ils venaient de se faire éjecter de la bibliothèque, alors il se devait de lui donner des réponses.

"Alors... Tout à l'heure, c'était toi ?"

Contrairement à ses prévisions... la voix était douce. Elle était exempte de la moindre trace de crainte, alors même qu'il devait passer pour une grosse brute à ses yeux. Exempte également de colère, à cause de sa journée bibliothèque qui s'était faites gâcher par sa faute. Il n'y avait pas non plus une once de tristesse... Non, la voix était tout simplement douce. A croire qu'elle se fichait totalement de ce qu'il s'était passé. Noïd ne put retenir une mimique vaguement surprise. La plupart du temps, les gens lui hurlaient qu'ils allaient le buter, ou encore lui balançaient des insultes. La dernière personne à avoir employé cette voix pour lui parler... Ça avait été Bruna. Et elle s'était faites tuer le même jour.
Cette gamine, depuis cette date, était la première à lui parler... comme un être humain normal.

- « Bonne réponse de la candidate... », répondit sur un ton laconique l'ange déchu. « J'ai enfoncé dans la table un type qui m'a agressé, mais bon... il devrait s'en remettre. Eh oui, je suis une brute, si jamais tu te poses encore la question. Quand je dis que tu devrais pas rester à côté d'un type comme m... »

Il ne finit pas sa phrase. Le petit bout de femme, aux prises avec ses pensées, venait de se faire bousculer par un garçon qui avait tout du petit voyou... Non, pas du même genre que Noïd ; beaucoup moins classe. Sauf qu'en plus, elle s'excusa. Le déchu écarquilla les yeux. Punaise, elle se faisait presque jeter à terre par un crétin et elle s'EXCUSAIT ?
Ça, encore, ça aurait pu passer. Sauf que Noïd en tant qu'ange... entendait bien mieux les mots qu'une personne lambda. Aussi, ce qui sortit de la bouche du coupable... ressemblait bien trop à une insulte à son goût. C'en était assez pour que dans un accès de colère, il attrape le type par le col et le plaqua contre le mur. Une vague étincelle d'adrénaline faisait luire ses yeux rubis. Le genre d'indicateur clair qu'il était prêt à loger son poing dans la face du type qu'il tenait dans sa main droite.

- « Dis donc... Je crois que tu viens de la blesser. Et que tu viens de l'insulter... Alors, à moi que tu veuilles mourir, je penses que tu vas t'excuser, toi aussi. Avant que je ne compte jusqu'à trois.

- Mais je... »

La poigne de l'ange déchu se serra un peu plus sur le col du type alors que ses yeux semblaient luire plus fort que jamais. Il pouvait lui éclater la tronche. Il le pouvait.

- « Un. »

Il ne savait pas pourquoi il avait pété un câble comme ça. Peut-être parce que elle lui avait rappelé Bruna, l'espace d'une seconde. Peut-être parce qu'il ne supportait pas l'injustice... Ou alors peut-être pour une autre raison. Ou peut-être aussi à cause de toutes ces raisons là. Il ne le savait pas. Noïd jeta un bref coup d'oeil à la petite, et fit une grimace qui caricaturait un sourire. Parce qu'il était furieux.

- « Deux. »

Blasée. C'était ce qu'elle vivait au quotidien. Toujours à essayer de se faire toute petite, à ne pas s'attirer d'ennuis... C'était pourtant bien souvent le contraire qui arrivait toujours.

Elle ne pensait pas qu'en entrant dans cette bibliothèque, elle puisse croiser un gars comme lui. Les mots crues qu'il utilisaient... Elle en frissonnerait presque. Elle imaginait la tête de ce pauvre élève dans la table de la bibliothèque ! Et tout les autres aux regards moqueurs, méchants, jaloux, apeurés, tout ces gens qui les regardait sans rien dire ni rien faire. Ce lycée la dégoûtait. Et que penser de lui ? Une brute ? Oui elle le pensait. On encastre pas la tête d'un type comme ça dans une table ! Mais qu'était-il pour avoir autant de ... Hargne ? Un monstre probablement, mais ... Quoi, exactement ? Curiosité quand tu nous tiens.

Elle ne s'attendait d'ailleurs pas non plus à ce que cette ... Brute prenne sa défense. Enfin sa défense... Si tenté qu'il y en ait réellement besoin d'une. Elle s'était faite bousculer, il n'y avait pas mort d'homme. Il était donc inutile de se mettre dans tout ses états, à encore vouloir démonter la face de quelqu'un. Bien qu'au fond cela lui fit un tantinet plaisir, elle se morigéna rapidement. A vrai dire elle pensait qu'il n'avait pas fait ça pour elle, mais bien pour passer ses nerfs, encore. Sauf qu'elle ne fût décemment pas d'accord avec cette idée, il était hors de question qu'il arrive quoi que ce soit, et d'une, à un élève devant elle sans qu'elle n'essaye rien, et de deux, par sa faute. Et en plus il aura encore des problèmes avec la bibliothécaire, et probablement elle avec si elle le laissait faire.

Mais ... Au vu de la situation ... Comment intervenir sans risquer de se faire péter la figure ? Noïd tenait l'élève par le col contre une étagère, il avait l'air très en colère. Et elle doutait que sa simple parole suffise à le calmer. Elle se mit juste à côté, paniquée il faut bien l'avouer. Elle regarda autour d'elle, les élèves se rameutaient encore. Et ne faisaient que regarder, encore. Elle fronça les sourcils. Il y'avait probablement des élèves assez puissants ou du moins assez malin pour le faire arrêter non ?! Pourquoi n'intervenaient-ils pas ?!

Elle reposa son regard sur lui, il la regardait. Il ... Il grimaçait de colère.

"Deux."

C'en était assez maintenant ! Elle agrippa de ses deux mains le bras tenant l'élève par le col, elle savait que même en appuyant de tout son poids, il tiendrait, alors elle n'essaya même pas. Elle voulait simplement attirer son attention. Et lorsqu'elle fut certaine de l'avoir, elle le regarda dans les yeux, le fixant de ses prunelles noisettes, mi-angoissée, mi-sûre d'elle, mi-énervée mi-triste.

"Mais arrête ça bordel, tu te crois ou là ?! Il t'as rien fait ce gars alors lâche-le ! Tu crois pas que t'as déjà fait assez de dégâts comme ça ?!"

Elle continua cette fois-ci plus doucement, espérant ainsi le calmer réellement.

"Tu vas encore t'attirer des ennuis, et j'suis sûre que c'est pas ce que tu veux. Il en vaut même pas la peine ! Et puis quoi, je vais bien ! Ce qui risque de pas être son cas si tu le tabasses. Alors maintenant lâche-le s'il te plaît...

Elle n'avait pas la moindre idée de la réaction qui allait suivre. Peut-être la rejetterait-il d'un mouvement de bras, ou peut-être avec un peu de chance, il l'écouterait et entendrait raison... Avec beaucoup de chance... En fait elle ne croyait pas du tout qu'une telle intervention puisse fonctionner sur lui ... Mais c'était tout ce qu'elle pouvait faire pour sauver ce pauvre gars. Bien qu'à la base ce soit en partie sa faute, Jimena n'était pas rancunière pour deux sous, et puis même, la punition ne valait pas le préjudice subit. Il ne méritait pas ça. Et quand bien même il aurait mérité une sanction, ce n'était certainement pas à lui de la lui infliger.

Pendant une seconde, Noïd sentit un poids peser sur son bras, et tourna la tête... Avant de manquer de s'étouffer en reconnaissant la petite dont il ne connaissait toujours pas le nom qui essayait visiblement de l'empêcher d'emplafonner le type qu'il tenait contre le mur. Ah c'est vrai, tout le monde ne partageait pas la même façon de penser que lui, il fallait qu'il s'en rappelle. Et ce qu'il pensait être une sanction juste pouvait passer pour certain comme un acte de barbarerie le plus total. Noïd planta son regard rubis vif dans celui, noisette, de la demoiselle.
Elle semblait un peu angoissée et surtout... triste ? Ah merde, c'était son comportement qui la mettait dans cet état ? Bon bah, est-ce que ça vaut vraiment le coup de tabasser quelqu'un si ça rend la personne que c'était censé aider, triste ?

"Mais arrête ça bordel, tu te crois ou là ?! Il t'as rien fait ce gars alors lâche-le ! Tu crois pas que t'as déjà fait assez de dégâts comme ça ?!"

Assez fait de dégâts ? Est-ce que c'était possible d'avoir fait assez de dégâts ? Pour lui, en tout cas non. Les mots comme « sens commun » n'avaient pas énormément de sens pour Noïd. Il n'était que rage et colère contenue, une rage qu'il ne pouvait pas éteindre, depuis la mort de Bruna. Il était en rogne contre la vie elle-même, qui lui avait pris l'être qui avait le plus d'importance pour lui. N'empêche, elle avait du cran cette petite. Vu la force exercée sur son bras, elle n'était certainement pas réputée pour sa force physique, mais malgré ça, elle s'opposait à lui.

"Tu vas encore t'attirer des ennuis, et j'suis sûre que c'est pas ce que tu veux. Il en vaut même pas la peine ! Et puis quoi, je vais bien ! Ce qui risque de pas être son cas si tu le tabasses. Alors maintenant lâche-le s'il te plaît...

L'ange aux cheveux blancs écarquilla les yeux. Wow, c'est qu'elle était altruiste ! Elle s'inquiétait à la fois pour la santé du type et... pour lui ? Punaise, mais depuis quand les gens se souciaient de lui ? C'était tellement inhabituel que le déchu ressentit une curieuse vague de chaleur se répandre depuis son cœur dans le reste de son corps.
Son regard passa de la jeune femme à l'élève qu'il tenait plaqué contre le mur, avant de revenir sur elle. Puis il lâcha le type, qui s'effondra comme un tas de linge sale par terre, respirant difficilement. Il abaissa également son poing gauche, qui lui était bien paré à défoncer la gueule du mec.

- « … Très bien. Allez, tires-toi, avant que je ne change d'avis. », alors que le type se relevait, Noïd se tourna vers celle qui l'avait empêché de le démonter. « Je fais pas ça pour n'importe qui... Tch, je te l'avais dit que je suis une brute. Alors, tu n'as pas trop peur de moi, à part ça ? »

Bah, ce serait pourtant la réaction logique. Du coin de l’œil, Noïd remarqua que sa « victime », venait de se relever, et leur jetait un regard hargneux. Pas le moins du monde intimidé, Noïd se retourna, et lui décocha en retour un regard au moins aussi froid.

- « Tu...tu vas voir ! Tu payeras, toi et ta copine ! On... On se reverra ! », balbutia le mec, assez pitoyable en soi. Sauf que cela eut l'effet d'arracher un grognement de fureur à Noïd, qui se retint ne pas l'exploser sur place, ici et maintenant. Non... ne... pas... taper.

- « Essaies... seulement. Tu peux tenter de me faire ce que tu veux... Mais n'envisages même pas de la toucher, c'est clair ? C'est à sa gentillesse que tu dois le fait d'être en un seul morceau. », répondit l'ange aux cheveux blancs. Il ne voulait pas impliquer cette fille... Surtout pas l'impliquer ! « Alors si tu t'avises d'effleurer heu... Heu, comment tu t'appelles, au fait ? Enfin bref... je te promet de te retrouver et... JE T'EXPLOSERAI ! »

Le mec détala ventre à terre. Noïd regarda les alentours. Quelques élèves regardaient. Merde, ils étaient pas un spectacle ambulant ! Il attrapa la main de sa jeune fille et l'entraîna d'un pas vif vers un coin un peu plus tranquille, à deux pas de la bibliothèque. Quand il fut certain qu'ils étaient tranquille, enfin Noïd s'autorisa à dévisager la personne dont il ne connaissait toujours pas le nom, et à lui dire :

- « Désolé... Je voulais pas t'entraîner la-dedans. Y a un bon paquet de mecs qui veulent me faire la peau, et vu que je les démontes, bah il y en a encore plus. », dit sur un ton laconique le déchu. Mais il était sincère dans ses excuses. « C'est pour ça que j'essaie d'éviter de m'approcher des gens. Désolé. »

Etonnament, il fut plus réactif que ce qu'elle aurait imaginé. Il ne l'envoya pas bouler, il ne l'insulta même pas. Il se contenta de le lâcher. Le garçon tomba au sol, mais elle ne le regarda pas. Elle ne comprenait pas ... C'était une brute, mais il venait de la défendre, et en plus de ça il l'avait écouté.

"Merci..." Murmura t-elle.

C'est tout ce qu'elle sut dire sur le moment. Mais pourquoi merci ? A bien y réfléchir ça n'avait pas plus de sens que les excuses qu'elle avait balbutié au gars qui l'avait bousculé. Parfois sa propre logique lui échappait. Elle laissa un moment son regard vagabonder sur le visage de ce qui apparaissait comme de moins en moins être une brute aux yeux de la jeune fille. Jusqu'à ce que l'autre se relève et les menaces. Aaah l'ingratitude... Elle ne comprendrai jamais ça non plus. Elle venait de potentiellement lui sauver la vie quand même ... Enfin...

Alors Noïd prit de nouveau sa défense. Elle le regarda soudainement interloquée, heureusement qu'il ne la regardait pas d'ailleurs, de quoi devait-elle avoir l'air, avec cette face stupide ? Elle en fut tellement retournée qu'elle ne répondit pas quand il lui demanda son nom. Mais pourquoi il la protégeait comme ça ? Qu'en avait-il à faire d'elle, au final ...

Puis le gars finit par s'en aller. A vrai dire il décampa plus qu'autre chose. C'est vrai que Noïd faisait peur. Il possédait une carrure et une prestance assez impressionnante. Mais au fond, Il n'était peut-être pas si vilain que ça.

Puis ils s'en allèrent eux aussi ... Presque mains dans la mains... Cela la fit rougir un peu, elle n'était pas habituée à une telle proximité. Pas aussi spontanément. Désormais assez loin de la bibliothèque pour ne plus être espionnée par quiconque, ils s'arrêtèrent et Noïd fit ses excuses. La petite Jimena finit d'être déroutée. A vrai dire il était plus simple de voir Noïd comme une véritable brute, plutôt que de voir que finalement, il était loin d'être uniquement ça. Tout devenait soudainement plus compliqué. S'il avait été une simple brute, elle se serait prit une paire de claque, puis s'en serait aller sans plus jamais le revoir. Mais maintenant... Maintenant elle ne pouvait plus le laisser seul, comme il prétendait l'être. Elle savait le poids que la solitude pouvait avoir sur un être et elle pensait commencer à comprendre pourquoi, finalement, il agissait en brute.

"Jimena."

C'était son prénom. Mais dit tout seul comme ça, hors contexte, ça n'allait peut-être pas être clair. Et puis après ce qu'il venait de dire...

"Enfin je veux dire, c'est mon prénom !"dit-elle pour éclaircir les choses.

De quoi avait-elle l'air maintenant... Elle détourna le regard, gênée.Mais elle ne put s'empêcher de reprendre la parole pour lui demander ce qui la taraudait un peu depuis quelques secondes.

"Il y a quelque chose que je comprends pas ..."

Relevant la tête vers lui, elle croisa de nouveau son regard. Elle le regardait maintenant sans crainte, il ne lui ferait pas de mal après tout ce qu'il venait de faire pour elle.

"Si ... si les gens t'agressent parce que t'en agressent d'autres, pourquoi t'arrêtes pas tout simplement de leurs répondre ? Je veux dire, si tu te bagarre plus, ils n'auront plus de raison de venir se battre contre toi. C'est stupide de leurs répondre finalement !"

Consciente qu'elle aurait pu le blesser en disant cela, elle ajoute rapidement:

"Enfin je veux dire... C'est pas stupide mais c'est illogique je ... Comprend pas... Et puis ce pauvre garçon, tu lui a fracassé la tête, et tu n'as pas fait que ça, tu l'as humilié. Je ne pense vraiment pas qu'il méritait ça."

Elle garda la tête haute, ce qu'elle disait elle le pensait. Elle ne voulait pas le froisser, juste essayer de comprendre... Elle espérait qu'il ne se braque pas trop. Ce gars. Pourquoi est ce qu'elle voulait le comprendre ? Pourquoi elle ne s'en allait pas tout simplement ? Quelle heure était-il ? Probablement pas tard. Qu'est ce qu'elle ferait après ça ? Rien. Quelque part, il l'avait un peu sorti de la routine. Elle soupira un peu. Peut-être ferait-elle mieux d'abandonner l'idée et simplement rentrer dans sa chambre.

"En fait ça ne me regarde probablement pas et je suis trop curieuse ... Et je parle beaucoup trop...Désolée."

Elle détourna la tête. C'était quoi son problème bordel ? Pourquoi elle arrivait pas à se mêler de ses affaires ? A apprendre à se taire ? Elle qui tentait désespérément de ne pas se faire remarquer, c'était encore une fois loupé.

Elle semblait étonnée. Eh bien oui, ma petite, figures-toi que les gens ne sont pas si simple à comprendre que tu ne le penses. Noïd était certes un bourrin avant toute choses, mais ce n'est pas pour autant qu'il n'était pas capable d'écouter quelqu'un qui le suppliait presque (quoique un peu vivement) de ne pas loger son poing dans la gueule d'une autre personne. Surtout quand c'était pour ce quelqu'un qu'il s'était mis en colère à l'origine.
Ce qui était étrange, c'était qu'elle le regardait un peu différemment maintenant. Comme si le fait d'avoir été capable de renoncer à tarter quelqu'un lui avait permis de se montrer sous un jour différent envers une personne. A croire qu'elle était paumée, maintenant qu'elle ne pouvait plus lui attribuer l'étiquette « brute sans cervelle ». Et en plus, pourquoi elle était rouge ?

"Jimena." , dit elle soudainement, arrachant un vague froncement de sourcils au déchu. De quoi ? "Enfin je veux dire, c'est mon prénom !"

Ah, d'accord. Son incompréhension passée, Noïd s'autorisa à sourire du coin des lèvres. Apparemment, cette Jimena n'était pas extrêmement douée lorsqu'il s'agissait d'avoir un contact clair avec les personnes qu'elle venait de rencontrer. Enfin, c'était également la personne qui n'avait pas eu de scrupules à le saisir par le bras pour qu'il lâche quelqu'un, donc comme quoi, lui aussi n'avait pas le droit de lui attribuer une étiquette tout de suite. Mais il ne s'attarda pas plus sur ces pensées, étant donné qu'elle reprenait la parole, osant cette fois le regarder droit dans les yeux.

"Si ... si les gens t'agressent parce que t'en agressent d'autres, pourquoi t'arrêtes pas tout simplement de leurs répondre ? Je veux dire, si tu te bagarre plus, ils n'auront plus de raison de venir se battre contre toi. C'est stupide de leurs répondre finalement !"

En effet, c'était la logique de la majorité des personnes. Quand quelqu'un t’insupportes, la réaction classique serait de tout simplement l'ignorer. Malheureusement, ce n'était pas une réaction dont il était capable, il était beaucoup trop... droit pour ça. Et a force de rentrer dans un cycle taper/se faire taper, eh bien, il avait parfois énormément de mal à réguler ses nerfs. C'est vrai qu'il y avait des moment ou il était probablement excessif, Jimena lui rappela juste après.
Est-ce que le gamin qu'il avait attrapé par le col juste parce qu'il avait marmonné une insulte méritait vraiment son sort ? Probablement pas... mais ça, ce n'était pas vraiment une chose dont il se préoccupait, il y avait des comportements qu'il ne permettait pas, encore moins devant ses yeux. Se comporter comme ça relevait de la gaminerie pure et simple.
Et lui n'était pas du genre à tolérer la gaminerie, même si c'était lui qui devait endosser le mauvais rôle.
Mais déjà, Jimena s'excusait, arrachant un air vaguement interloqué au déchu. De quoi elle s'excusait, exactement ? Lui n'était pas du genre à se retenir de dire les choses qui fâchent, alors pourquoi... ? Ah, c'est vrai qu'elle n'était pas exactement le même genre de personne que lui.

- « Heu... Honnêtement je m'en tape, c'est pas comme si c'était interdit de me poser des questions, hein. », dit d'une voix ou perçait une vague teinte d'étonnement le déchu.

Jetant un coup d’œil derrière lui, histoire de s'assurer qu'une autre brute n'arrivait pas pour chercher le contact, il se détourna un bref instant de sa camarade de discussion, avant de nouveau se retourner vers elle, rassuré.

- « Pour répondre à ta question... C'est parce qu'ils me gonflent, et tant que quelqu'un ne leur aura pas fait la leçon, ils continueront leur conneries. Alors ouais, je me suis foutu dans un cercle vicieux, mais je suis pas du genre à me laisser tabasser quand t'as trois ahuris qui viennent m'exploser la gueule. »

Il disait ça d'une voix tranquille, absolument pas choqué par son langage un peu brut. Enfin, si ça indisposait Jimena, elle se serait déjà barrée depuis longtemps. Noïd la dévisagea, sans ciller. Elle n'était clairement pas comme lui, ça se sentait.

- « Tu veux savoir quel était le premier type que j'ai tabassé ? Un ahuri qui était en train d'attaquer un élève qui faisait la moitié de sa taille. Alors ouais, la réaction logique aurait été d'appeler un prof. Mais non. Quand j'ai un truc à faire, je le fais. Mais ce type a ramené ses deux potes le lendemain, je les ai massacré tous les trois. », dit d'une voix calme Noïd. « Le lendemain, il y en avait encore plus. Et finalement, il y en a eu tellement qu'un jour, j'ai fini par me faire tabasser à mon tour, et j'ai passé une semaine à l'infirmerie pour qu'ils me remettent le visage en place. »

Il n'était en aucune manière gêné de raconter cela. Une défaite n'était rien de plus qu'une défaite, et il n'avait jamais honte de reconnaître qu'il était vaincu.

- « Je ne suis pas du genre à rester les bras croisé quand un truc d'injuste se passe devant moi. Alors je cogne. Et je ne suis pas con au point de nier que j'aime ça. Oui, j'aime le combat, j'aime l'adrénaline qu'il procure, et je ne suis pas contre le fait de prendre des coups. Mais taper quelqu'un sans raison, ce n'est pas mon genre. Seulement, je ne suis pas quelqu'un de patient, et quand j'ai envie de m'énerver, je m'énerve. Voilà, c'était ce que tu voulais savoir, non ? »

L'ange déchu croisa les bras. Il avait bien tendance à se foutre de ce que les gens pensaient de lui, alors il se demandait bien pourquoi il était en train de confier tous ça à un bout de femme qu'il connaissait à peine. Parce qu'elle lui avait demandé ? Non, cela ne pouvait pas se résumer seulement à ça. D'une certaine manière, il trouvait étrange que Jimena, une fille qui était pour ainsi dire presque l'exact opposé de lui, essaye de le comprendre. Parce que c'était bien ça qu'elle avait essayé de faire. Le comprendre.
La ou certains se seraient contentés de lui dire « Nan, ce que tu fais, c'est trop maaaaal. », elle lui avait demandé pourquoi. Une fille singulière.
Pas le moindre doute dessus.

- « ...Mais je peux te demander toi aussi pourquoi tu passes ton temps à t'excuser et à baisser la tête ? J'veux pas du tout te vexer, hein... », dit presque doucement l'ange aux cheveux rouge vifs. « Disons que résoudre les conflits ne peux pas toujours se faire en faisant des concessions... Du moins je crois. »

Hum, c'était probablement pas non plus ça, niveau tact et finesse. Il faudrait vraiment qu'il apprenne à s'exprimer délicatement, un jour. Noïd ne lâchait pas Jimena du regard, cherchant à lire dans ses yeux... Car lui aussi, il était curieux.
Et lui aussi, il avait envie de comprendre le mystère que représentait à ses yeux cette jeune fille.

- « Enfin... Ne pas humilier les autres, c'est bien. Mais ça vaut le coup de te faire humilier toi à la place ? Je trouve ça... un peu triste. Enfin, si t'as pas envie de me répondre, c'est toi qui voit. Désolé. »

C'était lui, qui s'étonnait maintenant. Voilà que lui aussi se mettait à s'excuser sans raison... Enfin, si, avec un peu de raisons quand même, mais... Enfin, il commençait à se sentir lié à elle. Au sens il c'était quelqu'un qu'il n'avait pas envie de blesser, même accidentellement. Et ça, venant de sa part, c'était assez inhabituel. Ce n'était sûrement pas seulement parce qu'elle était gentille avec lui, et se comportait comme si elle n'avait pas peur de lui. Pas non plus parce qu'il la trouvait extrêmement jolie. Et pas non plus parce que pour une fois, une personne n'appartenant pas à son monde essayait de comprendre ce qui se passait dans sa tête.
Non, ça devait plutôt à cause de ces trois raisons, en fait...

Il prit un air surprit à son tour. Ainsi donc la jeune fille pouvait lui posait toutes les questions qu'elle voulait. A vrai dire ce n'était pas tant les poser le problème, mais savoir si il allait y répondre. En tout cas il était parti pour lui répondre. Mais il se retourna avant, comme s'il vérifiais que personne ne les espionnaient. Elle trouva cela étrange, mais s'en fichait finalement.

Elle l'écouta. Elle l'écouta lui raconter pourquoi, mais aussi et surtout comment, il était entré dans ce cercle vicieux. Jimena se laissa à penser que finalement, il avait peut-être un bon fond... Mais elle se morigéna rapidement. Non, non, non, la violence n'a jamais été une solution, du moins pour elle, il y avait forcément un autre moyen de tout régler. D'autant plus que parfois, il frappait sans vraiment de raison, y'avait qu'à voir les cinq dernières minutes ! Alors même si ça partait d'un bon sentiment, ou qu'il s'agissait d'auto-défense, il était peut-être inutile d'aller jusqu'à les « massacrer », pour utiliser ses propres termes.

En même temps … Elle n'était peut-être pas la mieux placé pour dire ça. Elle, dans sa situation... On la ramasserait probablement à la petite cuillère. Mais imaginons un instant qu'elle ait sa force … Elle n'arrivait pas tellement à imaginer sans cesse fuir des poursuivants qui cherche la bagarre... Et même, si elle avait un tel pouvoir, ne voudrait-elle pas l'utiliser pour aider les gens ? Hum... Se connaissant, elle en aurait plus peur qu'autre chose. Bref. Tout ça pour arriver à la conclusion que finalement c'était pas si simple, même pour elle de résoudre cette équation. Et elle s'en voulait de l'avoir jugé bien vite.

Mais, en même temps … Il venait de lui avouer qu'il prenait du plaisir à se battre, et ça ! C'est mal ! Dixit celle dont l'éducation a toujours été parfait de maniement d'armes, de combats en tout genre. Et elle aimait ça. Oui c'est vrai elle appréciait se battre de temps en temps. Mais pas pour faire mal. Pas pour donner des coups. Blesser quelqu'un l'avait toujours répugné, c'était ainsi qu'on l'avait éduqué, assez contradictoire. Mais lui, y prenait-il du plaisir, à faire du mal aux gens ? Elle avait soudainement envie de penser que non, qu'en fait, il était un gentil garçon. Elle n'avait plus du tout envie de penser que c'était une brute. Elle voulait chasser cette idée. Mais c'était aussi ce qu'il était, d'un côté... Bon sang ce garçon lui retournait le cerveau avec ses contradictions ! Comment pouvait-elle se sortir de là ?!

« Désolée... Je t'ai jugé un peu vite je crois. Mais peut-être que … Peut-être que tu pourrais essayer de réduire tes coups, ou je sais pas, faire un truc …Ca éviterai que tu fasses du mal aux autres, et qu'on t'en fasse à toi...»

Jusque dans ses paroles, on sentait la contradiction moral qu'elle se faisait subir. L'aimer ou le détester, ça se résumait à ça. L'accepter, lui, ce qu'il faisait, ou le refuser, l'envoyer balader, ne plus jamais lui parler. Elle soupira, pourquoi fallait toujours qu'elle complique tout ? Elle balaya ses premières paroles d'un revers de main, puis elle dit en s'adossant au mur :

« Bah, laisse tomber, je raconte n'importe quoi. Je suis sûrement de très mauvais conseils dans ce domaine là ! »

Et c'était certainement vrai.

Puis soudainement, les rôles se sont retrouvés inversé. C'était lui qui posaient les questions, et elle qui devait y répondre. Elle allait lui répondre. Il avait eu la sincérité de le faire, alors elle se devait de lui rendre la pareil, au moins un peu. Elle leva les yeux vers lui, lui offrant un mince sourire, à vrai dire le premier depuis qu'ils s'étaient rencontrés. Mince, mais sincère.

« Le plus souvent, ce que l'on dit de moi, m'indiffère. Et puis, je ne suis pas la plus à plaindre ici, j'ai jamais eu de réelles problèmes avec personnes, je me fais discrète et je ne me fais pas remarquer... Alors dire que je me fais humilier à la place d'autres est un peu exagéré je trouve.»

Elle sourit cette fois un peu plus. C'était vrai qu'elle se faisait discrète. Mais c'était faux que ce qu'on disait sur elle l'indifférait. Cela la touchait plus qu'elle ne le pensait, mais bien évidemment, elle ne volait pas se l'avouer. Cela dit, le reste étant vrai... Elle n'avait jamais eu l'occasion de vraiment faire face à ça, et pour elle, le fait qu'elle se soit fait bousculer n'était en rien une humiliation.

« Et pour mes excuses à répétitions... Bah, j'suis comme ça, j'ai toujours l'impression, tout du moins, j'ai toujours peur de mal faire les choses, alors je m'excuse sans arrêt... »

Un manque de confiance en soi évident. Fatiguée de rester debout, elle finit par se laisser glisser contre le mur, posant son sac à côté d'elle.

« Enfin voilà... »finit-elle par dire, songeuse. Elle finit par relever la tête pour le regarder dans les yeux. Elle ne voyait décidément plus la brute d'il y a quelques minutes.

« Désolée... Je t'ai jugé un peu vite je crois. Mais peut-être que … Peut-être que tu pourrais essayer de réduire tes coups, ou je sais pas, faire un truc …Ca éviterai que tu fasses du mal aux autres, et qu'on t'en fasse à toi...»

Noïd ouvrit la bouche, puis la referma. Encore une fois, elle s'excusait d'un truc qu'elle n'avait pas à faire... Nan, mais en plus, elle s'excusait de l'avoir jugé ? En quoi c'était mal de juger quelqu'un ? Surtout une personne comme lui, dont le tempérament brutal faisait que l'on le cataloguait vite comme un crétin sans cervelle. Cette fille le laissait sans voix, vraiment. Et en plus... bah oui, elle s'inquiétait un peu pour lui.

- « Je... te l'ai dit. Je ne frappe pas sans raisons. Même si j'aime me battre, c'est parce que ça me... prouve d'une certaine manière, que j'existe. Là d’où je viens, on était obligé de se plier aux règles. On ne ressentait rien, on vivait juste, pas si différents que des machines. Maintenant, même la douleur que je ressens me rappelle que je l'ai choisi, que c'est à cause de mes choix que j'en suis arrivé là. »

C'était une raison suffisante, selon lui. Il frappait certes, mais il ne prenait jamais la vie, à moins d'avoir une excellente raison de le faire. A vrai dire, dans ce lycée, il n'y avait qu'une seule personne dont il se sentait prêt à prendre la vie. Et cette personne, c'était Anod Itochi, le psychologue du lycée Yokai, un immonde salaud prêt à tout pour faire souffrir les autres en les torturant mentalement. Car il était doué pour ça.
C'était l'unique personne qui suscitait de telles pulsions de violence chez Noïd dès qu'il le croisait, et il avait une furieuse envie de l'emplafonner. Car il était à l'origine de sa création.

« Bah, laisse tomber, je raconte n'importe quoi. Je suis sûrement de très mauvais conseils dans ce domaine là ! »

L'ange déchu sursauta. Il s'était perdu dans ses pensées, et en avait presque oublié Jimena. La fille à qui il venait à son tour de poser des questions. Et la fille qui venait de lui offrir un léger, mais sincère, sourire. Ce fut lorsqu'il l'aperçut qu'il sentit que quelque chose n'allait pas avec lui. Il faisait attention à ce qu'il disait lorsqu'il lui parlait...
Et surtout, à cause de ce sourire...pour la première fois depuis longtemps...
Noïd avait rougi.

Mais ce ne fut pas pour autant qu'il n'écouta pas ce qu'elle lui dit... Ce fut presque le contraire, d'ailleurs. Noïd écoutait avec attention ce qu'elle lui répondait. Parce qu'il savait que sa logique était entièrement différente de la sienne, et la comprendre n'était pas une chose si simple pour lui. Et c'était pas faute d'essayer, pourtant.

« Et pour mes excuses à répétitions... Bah, j'suis comme ça, j'ai toujours l'impression, tout du moins, j'ai toujours peur de mal faire les choses, alors je m'excuse sans arrêt... »

Quand il disait qu'ils étaient radicalement différents... Lui il y avait au moins un point sur lequel il se savait bon, c'était sa confiance absolue en ses moyens. Il se savait capable de faire certaines choses. Visiblement, Jimena n'était pas dans son cas... Elle avait du mal à avoir confiance en elle, ça se sentait. D'un côté le bourrin qui a du mal à s'arrêter. Et de l'autre la jeune fille qui a du mal à se lancer. Fameux duo.

« Enfin voilà... »

Se décidant pour une fois à paraître gentil, Noïd lui rendit son sourire, alors qu'elle s'asseyait, posant son sac à côté d'elle. C'était quand même une situation franchement curieuse, malgré le fait que c'était lui qui l'avait provoqué, de se retrouver seul avec une jeune fille dont il connaissait presque rien. Se décidant à reprendre la parole, il articula :

- « Je sais que c'est simple de dire ça... Mais tu devrais prendre un peu confiance en toi. Je suis sûr qu'il y a un tas de trucs que t'es capable de faire, mais tu t'en rends tout simplement pas compte... Et t'as une force de caractère aussi. Enfin, c'est vrai que « humilier » n'était pas le bon terme, tout à l'heure... Mais c'est que je suis du genre à ne pas laisser les gens médire sur moi derrière mon dos, donc, dès que je plie le dos, je... ben je m'humilie tous seul, quoi. »

Ce fut le moment que choisit le mec pour arriver derrière Noïd. Celui-ci sentit sa présence, et se crispa, avant de se retourner brusquement. Il le reconnaissait, un mec à qui il avait pété une dent à la sortie du cours de philosophie, parce que le fait qu'il participe ne lui avait pas plu.

- « Hé, Ochita ! Elle est mignonne, ta copine, dis donc !

- ...Oui, en effet. », répondit Noïd, essayant pour une fois de se montrer pas trop gonflant, pour éviter le conflit direct. Oui, il sentait la colère qui grimpait en lui, mais il essayait de se contenir.

- « Ce serait bête que son visage soit abîmé, tu ne penses pas ? Je voudrais pas lui faire de mal...

- De toute manière, tu peux essayer... Mais si tu touches à un seul de ses cheveux, soit assuré que je te démolit. »

Noïd avait parlé froidement, mais une très vague pulsion d'énergie faisait onduler ses vêtements. Il se contenait encore, parce qu'il savait que Jimena n'aimait pas la violence, mais il sentait les barrières qui jugulaient sa fureur sautaient les unes après les autres. Non, ne pas se mettre en... colère.
Sauf que contrairement à d'habitude, le type ne fut pas impressionné, il se contenta de rire, a vrai dire. Et de rétorquer :

- « Oui sauf, que si tu me touches, Ochita. Soit assuré que c'est elle qui en fera les frais. »

Noïd se figea. « Tu n'oserais pas... Ordure. » Il savait que le type en question avait une bande, composée de quatre/cinq personnes. Lui, il pouvait se battre sans problèmes... Mais il ne savait rien des compétences de Jimena, et surtout ne voulait pas la mêler à ça.

- « On sait jamais, je suis très rancunier il paraît... Mais de toute manière, c'est pas ton genre d'avoir quoi que ce soit à faire des autres, hein ? », fit-il en armant son bras. Il savait parfaitement que de réputation, Noïd était quelqu'un de droit. Ce dernier ce tourna vers Jimena, une mimique d'excuse aux lèvres.

- « ...Désolé. »

La droite du type le cueillit sous le menton. Noïd, qui ne cherchait même pas à se défendre, fut projeté en l'air, et fut rattrapé par un coup de pied avant qu'il ne touche le sol. Il valdingua et percuta durement le mur, juste à côté de Jimena. Groggy, il ne chercha pas à se relever, alors même que le type riait et s'éloignait. Noïd tourna la tête vers la jeune fille. Il avait l'arcade sourcilière explosée, ce qui faisait que son visage était recouvert de sang. De même, une légère quantité de sang suintait de sa bouche.

- « Désolé... », articula-il. « J'voulais pas te mêler à ça... Mais c'est râpé je crois. Pardon. Pardon. »

La d’où il venait... Mais d’où venait-il alors ? Elle ne connaissait aucun endroit sur Terre ou toutes règles étaient dictées, c'était que dans les films pour elle. Alors d'où venait t-il..

Cependant elle était contente de l'entendre dire qu'il ne frappait pas sans raison. Cela la soulageait étrangement... Elle pouvait rester avec lui, elle en avait le droit, puisqu'il n'était pas méchant. Elle n'avait pas envie de le détester. Oui, pourquoi elle avait pas envie ? Elle le connaissait pas plus que ça et pourtant, elle ne voulait pas le détester. Enfin, détester était un bien grand mot, car Jimena ne souhaitait détester personne. Disons plutôt qu'elle voulait l'apprécier réellement, et qu'elle ne voulait pas le laisser seul...

...Venait-il de rougir ? Ou avait-elle mal vu ? Bah, elle avait dû mal regarder, peut-être un défaut d'éclairage. M'enfin bref. Il lui sourit à son tour. Elle trouvait que cela le changeait totalement. Et que ça lui allait bien. Elle l'écouta. Il avait comprit son problème. Un gros manque de confiance en elle, c'était peu de le dire. Probablement qu'elle savait faire des trucs, mais des trucs tellement futiles, inutiles. Que savait-elle faire de bien ? Pas grand chose, hélas. Et pas grand chose de bien. Toujours la tête vers lui, elle omit de répondre à sa première partie, et lui répondit simplement :

« Oui mais parfois, ne pas rétorquer est signe que tu es plus intelligent que ces brutes. Alors tu n'as pas à t'auto-humilier. »

Elle allait continuer à parler, mais elle vit Noïd se retourner.

« Hé, Ochita ! Elle est mignonne, ta copine, dis donc ! »

A voir Noïd soudainement aussi tendu, et le regard de ce garçon si hargneux, Jimena comprit immédiatement que tout les deux n'étaient pas amis, et que c'était loin d'être des paroles de gentillesses. Elle resta assise, interloquée. Que comptait-il faire ?

A sa deuxième réplique, elle se releva brusquement. De quoi parlait-il ? Pourquoi il voulait s'en prendre à elle ? Perdue, elle resta là à les regarder tour à tour. Noïd la défendit encore, et on sentait à son timbre de voix à quel point il était … En colère. Il se contenait pour l'instant, mais Jimena se tenait prête à intervenir pour le retenir, au cas ou.

« Noïd... » ne put-elle s'empêcher de murmurer, inquiète pour lui. Elle ne voulait pas, non, elle ne voulait pas qu'il se relance dans une bagarre.

Elle n'avait simplement pas prévu la suite...

Le garçon fit comprendre à Noïd que s'il le touchait, c'était elle qui en subirait les conséquences. C'était … Jimena ne savait pas quoi faire, elle savait qu'elle n'avait aucune chance contre ce type, mais elle ne voulait pas que Noïd puisse être à sa merci. Il comptait faire quoi de lui maintenant ? Que devait-elle faire ? Un vent de panique souffla dans sa tête, tout allait si vite, elle ne savait pas quoi faire. Perdue, inutile. Bordel !

Et tout se passa si vite...

Il se tourna vers elle, s'excusant d'elle ne savait quoi. Elle n'eut pas le temps de réagir que le gars le frappait au visage. Horrifié elle cria :

« STOOOP !»

Ca n'eut aucun effet, il lui asséna un violent coup de pieds, Noïd valdingua contre le mur, tout près de Jimena qui recula par réflexe. Et l'autre s'en allait en ricanant... Elle avait envie de lui sauter dessus et de le frapper à son tour, sortir son épée maintenant, et le réduire en pièce.

« Espèce de... »

Elle était au bord de la crise de larmes. Tant d'émotions d'un coup, Jimena ne pouvait pas gérer. Putain. Elle serrait les poings, se retenant de hurler dans le couloir. Puis elle tourna doucement la tête vers Noïd. Il était en sang. Elle se précipita auprès de lui, se laissant tomber à genoux. Elle n'osait même pas le toucher, de peur de lui faire plus de mal. Il s'excusa. Deux fois. Cela l'énerva. C'était pas sa faute ce qui venait d'arriver, mais la sienne. Si elle avait pu se défendre, le défendre, rien de tout ça ne serait arriver. Mais pourquoi … Pourquoi il s'était pas défendu ?! Elle avait envie de le secouer, de lui hurler qu'il aurait du !

« MAIS POURQUOI T'AS RIEN FAIT ?! POURQUOI TU L'AS LAISSE FAIRE ?!»

Elle se frotta les yeux rapidement avant qu'une larme ne s'échappe et roule sur ses joues. Puis sans lui laisser le temps de répondre elle lui attrapa le bras le plus doucement qu'elle put, pour tenter de le relever.

« Faut aller à l'infirmerie, tu peux marcher ? » dit-elle d'une voix tremblotante.

Elle s'en voulait tellement. De n'avoir rien pu faire. Et par sa faute, il s'était fait frapper. Pourquoi Il l'avait protégé... Mais pourquoi … Ce qu'elle se trouvait inutile. Tout était de sa faute, elle ne cessait de se répéter ça.

« Aller debout, c'est pas très loin... »

L'aidant à se relever comme elle put, elle espérait ne pas trop lui faire mal. Elle se retenait de craquer. Après tout ce qui venait de se passer... Il fallait qu'elle se calme. Prenant la direction de l'infirmerie et en oubliant son sac contre le mur, de nouveau elle luit dit:

"T'aurais dû te défendre, t'aurais dû...Fallait pas le laisser faire..."

Noïd luttait contre son envie de tourner de l'oeil. Le type qui l'avait frappé faisait partie de la race des barbares, le genre de personne qui sont capable, de même que Noïd, d'arracher la tête de quelqu'un d'un seul coup. D'une certaine manière, qu'il soit encore conscient et en a peu près bon état était presque un miracle. La dernière fois qu'il avait encaissé des coups de plusieurs membres barbares... Il avait failli y passer.
Jimena semblait en colère... contre lui, l'homme... ou plutôt contre elle ? Le déchu parvint même à distinguer quelques larmes dissimulées dans les beaux yeux de la jeune femme. Elle n'aimait pas la violence, et devant elle, une personne venait de se faire tabasser. Merde, il l'avait intégré dans son monde, alors que c'était ce qu'il avait le plus cherché à éviter. Désolé, Jimena.

« MAIS POURQUOI T'AS RIEN FAIT ?! POURQUOI TU L'AS LAISSE FAIRE ?!»

L'ange aux cheveux blancs lui répondit par un sourire ensanglanté. La réponse n'était-elle pas évidente ? Plutôt mourir que laisser un truc t'arriver, il ne voulait pas que quelqu'un la touche, elle qui avait réussi à se tenir à l'écart de ce monde. Mais... d'un autre côté, il venait de comprendre ce qui se passait dans la tête de la petite femme. Elle se sentait responsable. Noïd se laissa attraper le bras, et grâce à elle, se mit péniblement debout.

- « T'inquiètes pas... Si je m'écroulais avec ce genre de blessure, je serais mort depuis longtemps. »

Claudiquant comme il le pouvait, et soutenu par Jimena, Noïd se fit guider vers l'infirmerie. Ce n'était certes pas loin, mais dans son état, il avait l'impression de marcher des kilomètres, vu la vitesse à laquelle il se déplaçait. Par chance, les couloirs étaient presque déserts, probablement à cause de la grosse brute de tout à l'heure, et ils ne croisaient que peu d'élèves, que Noïd se charger de faire fuir d'un regard. Oui, même la gueule en sang, il pouvait se montrer assez effrayant.
Mais ni l'un ni l'autre, absorbés par leur discussion, ne pensèrent à prendre les sacs. Jimena avait oublié le sien contre le mur, et celui de Noïd avait valsé lorsqu'il avait encaissé le coup de poing.
Mais pour l'heure, il s'en foutait.

"T'aurais dû te défendre, t'aurais dû...Fallait pas le laisser faire..."

Essayant de se montrer rassurant, il ébouriffa les cheveux de Jimena, un poil moins fort qu'il l'aurait voulu :

- « ...Je peux encaisser la violence, Jimena. », lui répondit-il, avec un maigre sourire. « Mais... Je ne supporte pas que d'autre souffrent à ma place. C'est ma faute, d'accord ? C'est moi qui l'ai provoqué, alors... pourquoi tu devrais en faire les frais ? »

Il s'interrompit, et avalée une gorgée de salive qui avait un goût assez proche de celui de son sang. Punaise, mine de rien, il avait mal. Il ne savait pas combien de pompes ce type faisait par jour, mais il cognait dur. Et fort.

- « Toi tu... Tu es loin de tous ça. Tu es à l'écart de mon... monde de violence. Alors je ne veux pas que tu perdes ça... Parce que si jamais tu le perdais... Qui me ferait la morale, à moi la brute ? Je ne veux... pas qu'il t'arrive quelque chose. »

Des mots gentils. Et sincères, surtout. Ce n'était pas seulement à cause de son éthique que Noïd avait pris les coups à la place de la jeune femme, mais aussi tout simplement à cause du fait qu'il n'aurait pas supporté qu'il lui arrive quoi que ce soit.
Et cette pensée là, il s'étonnait lui-même de l'avoir. Lui qui avait passé la précédente année seul, qui était connu pour n'avoir ni proches, ni amis. Maintenant, il se préoccupait de quelqu'un, de radicalement différent de lui. Et quelque part, ça lui faisait chaud au cœur, même si ça le choquait.

- « Tu peux me détester, je t'ai foutu dans la merde... Mais ce n'est pas de ta faute, Jimena. C'est moi, qui ai tout causé. C'est moi. Alors souris, ça rend la douleur plus facile à porter. Et tu es plus jolie comme ça. »

La main qui frottait la tête de Jimena lui fit une pichenette sur le front, avant que le déchu ne la laisse pendre à côté de lui. Punaise, elle était si loin, cette infirmerie ?

Merde, merde, merde, merde. C'est qu'il était lourd le Noïd. L'infirmerie n'était pas bien loin, mais ce n'était pas chose facile que de soutenir un garçon faisant deux têtes de plus et étant capable de fracasser la tête de quelqu'un contre une table de la bibliothèque. Comment en était-on arrivé là, il lui paraissait tellement invraisemblable qu'un gars comme lui se retrouve de l'autre côté de la barrière, celle des blessés... Avait-il réellement fait ça pour elle...

Il y avait relativement peu de monde dans les couloirs, et étonnamment, les seuls élèves qui traînaient prenaient la fuite lorsqu'ils les voyaient. Etaient-ils stupide ? Sérieusement, Noïd ne tiendrait même pas debout seul, comment pouvaient-ils penser qu'il était encore dangereux ? Et puis même, un ptit coup de main là, pour l'emmener à l'infirmerie, n'aurait pas été de refus.

A sa plus grande surprise, il eut la force de venir lui ébouriffer les cheveux. Elle tourna légèrement la tête vers lui, le regardant du coin de l'oeil, avant de rétorquer :

« Mais j'aurais très bien pu me défendre toute seule, tu n'avais pas besoin d'intervenir ! Tu peux encaisser... Non mais regarde-toi... Dans quel état tu es... »

elle refréna un nouveau flot de larmes. Le voir ainsi... Ca devenait insupportable. Elle avait menti. Se défendre contre un humain normal, oui, mais contre des monstres d'ici, elle n'avait jamais essayé, mais ne tiendrais certainement pas longtemps. Elle secoua la tête et ajouta :

« Et puis même ! Qui te dit qu'il ne reviendra pas ? Tu vas quand même pas encaisser à chaque fois ?! Ca ne peut pas continuer comme ça. »

Elle soupira légèrement. En même temps il avait fait ça pour elle, elle avait l'impression d'être … Ingrate.

 « Toi tu... Tu es loin de tous ça. Tu es à l'écart de mon... monde de violence. Alors je ne veux pas que tu perdes ça... Parce que si jamais tu le perdais... Qui me ferait la morale, à moi la brute ? Je ne veux... pas qu'il t'arrive quelque chose. »

Jimena détourna la tête pour cacher les quelques rougeurs qui lui montaient aux joues. Pourquoi était-il si gentil avec elle ? Lui faire la morale... Au moins il avait conscience qu'il allait parfois trop loin, c'était un bon début, non ? Il reprit :

 « Tu peux me détester, je t'ai foutu dans la merde... Mais ce n'est pas de ta faute, Jimena. C'est moi, qui ai tout causé. C'est moi. Alors souris, ça rend la douleur plus facile à porter. Et tu es plus jolie comme ça. »

La, Jimena ne savait plus ou se mettre. Elle voulait lui sourire mais si elle se tournait, il verrait qu'elle était de nouveau en train de rougir. La pichenette sur le front qu'il lui asséna lui fit tourner la tête malgré elle. Finalement elle lâcha prise, et lui offrit un sourire. Un petit. Il était tout de même tout ensanglanté, mal en point c'était certain. Et il avait fait ça pour elle.

« En tout cas... Merci d'avoir fait ça... Même si t'aurais pas dû ! Mais merci... »

Enfin le bout du tunnel. L'infirmerie. Elle était là. Elle alla frapper à la porte en espérant que l'infirmière ne traînerait pas trop. Une voix étouffée se fit alors entendre, Jimena ouvrit la porte. Mince, elle était déjà en consultation. Mais l'infirmière, voyant Noïd, réagit vite et se leva.

« Mon dieu que s'est t-il encore passé ? »

Jimena le fit s'asseoir sur une chaise, enfin libérée. La petite brune répondit :
« Il... S'est fait frapper, par un autre élève. »

Elle commençait déjà à l'examiner sans trop faire attention à elle, ni à l'élève qu'elle avait déjà dans son bureau. Puis quelques instants après, elle les fit sortir tout deux, en précisant qu'elle le reprendrai après cette urgence.

Et … Que devait-elle faire maintenant ? Elle ne savait pas trop. Elle s'assit sur une chaise faisant face à l'élève. Peut-être que l'infirmière déciderais de le garder pour l'allonger un peu... Si c'était le cas elle allait attendre longtemps non ? Et d'abord, pourquoi voulait-elle l'attendre ? Quand bien même il sortirait rapidement de l'infirmerie, qu'est ce qu'elle lui dirait ? Qu'est ce qu'ils se diraient ?

Elle se rendit compte que le gars en face semblait la dévisager. Elle baissa la tête et remarqua alors que son t-shirt était légèrement tâchée de sang. Elle tira le tissu et soupira. Le sang ça part pas bien ! Au moins maintenant, elle savait pourquoi elle restait. Il lui devait un t-shirt ! Enfin, c'était plus une excuse qu'autre chose à vrai dire... En fait, elle s'inquiétait vraiment pour lui, il n'avait probablement rien de grave mais... Elle voulait tout de même le savoir en bonne santé. Mais voilà, la question se reposait, et si l'infirmière le gardait un peu plus ? Elle n'allait pas attendre éternellement... Bah, au pire des cas, elle n'avait qu'à attendre qu'elle pointe le bout de son nez pour reprendre son autre patient. Et si elle ne le voyait pas sortir, c'est qu'il restait se reposer, alors elle viendrait peut-être un peu plus tard...

Elle ressassait encore et encore tout ce qui venait de se produire. Cela devait maintenant faire une bonne dizaine de minutes qu'elle attendait. Et elle en avait marre de repenser à tout ça. Se changer les idées. Oui, elle n'avait qu'à lire un livre. Le livre qu'elle a laissé dans son sac. Le sac qu'elle a … Laissé contre le mur du couloir. Et merde. Elle se leva précipitamment faisant sursauté le gars qui somnolait. Elle marche d'un pas pressé dans le couloir, se rendant compte que Noïd avait joué au petit Poucet avec son sang.

Elle arriva près de l'endroit ou il s'était fait cogner. Ca se voyait sur le sol. Elle espérait que les femmes de ménages n'aient pas trop de mal à nettoyer tout ça... Hélas, il ne restait plus que ça. Du rouge par terre. Pas de trace de leurs sacs.

« Oh non... Non ! »

Elle regarda par le couloir d'où ils étaient venus, sans succès. Elle passa une main dans ses cheveux. Bordel ce qu'elle pouvait être stupide ! Comment avait-elle pu oublier son sac ?! Y'avait celui de Noïd aussi, et quelque chose lui disait qu'il n'allait pas apprécier la nouvelle. Elle fit demi-tour et retourna à l'infirmerie. Le gars n'était plus là, à la place c'était une fille qui attendait. Elle la dévisagea à son tour. Ah c'est vrai, le sang. Tant pis. Le plus urgent n'était pas là. Elle ne savait pas du coup si Noïd était sortie ou non et ce qu'elle devait faire. Rester à attendre, ou le chercher ? Ou est ce qu'il aurait bien pu aller... Elle soupira et se retourna, perdue. Elle regardait fixement l'encadrement de la porte qui laissait en visuel le couloir. Le cauchemar n'était pas terminé...

« En tout cas... Merci d'avoir fait ça... Même si t'aurais pas dû ! Mais merci... »

Quelque part, c'était quand même agréable de se faire remercier. Ce n'est pas que se prendre les coups dans la tronche d'un barbare surpuissant, il ne l'aurait pas fait pour n'importe qui, surtout avec autant de résignation. Mais bon, Jimena restait Jimena, et elle devait continuer à penser qu'il avait été idiot de prendre les coups à sa place.
Mais il n'était pas le genre à changer aussi facilement. La faute à sa droiture qui faisait qu'il ne pouvait pas se regarder dans la glace quand il avait laissé une fille prendre les coups à sa place. Des fois, être un enfoiré c'était quand même plus facile.
Soutenu par Jimena, il entra dans l'infirmerie, claudiquant plus qu'autre chose. Le visage blasé de l'infirmière en le reconnaissant fut rapidement remplacé par une moue choquée en voyant son état. Oui, il n'avait été que très peu la voir pour lui. Généralement, c'était plutôt un mec en sang qu'il lui amenait, ce qui faisait qu'elle n'était pas habitué.

Jimena le força à s'asseoir, arrachant un soupir soulagé aux deux. La seconde suivante, l'infirmière foutait dehors le patient dont elle s'occupait ainsi que Jimena. Noïd ouvrit la bouche, puis la referma. Pour ainsi dire, il n'avait pas envie qu'elle parte, mais d'un autre côté, elle n'avait probablement pas envie de voir plus de sang.
...Oh, et puis merde.

- « … Vous foutez souvent les gens dehors comme ça, vous ?

- Fermez-la, Noïd. Je vais très probablement vous faire hurler de douleur, alors dites-vous que l'infirmerie est insonorisée, j'ai fait ça pour vous. Maintenant, tendez-moi votre bras, et en silence.

- Rassurant, dites-moi... »

Mais il fut forcé de se rendre à ses arguments. Car il passa les dix minutes suivantes à gueuler de douleur dans l'infirmerie, la soignante maîtrisant une technique de soin extrêmement efficace, mais également extrêmement douloureuse. Ensuite seulement elle apposa quelques pansements pour empêcher le sang de couler à nouveau, après s'être occupé de nettoyer les plaies.

- « La prochaine fois que vous jouez au bowling, Noïd, ne prenez pas le rôle de la boule, vous n'étiez franchement pas beau à voir. »

En réponse, le déchu grogna, avant de sortir de l'infirmerie, laissant le patient interrompu retrouver l'infirmière. Jimena n'était pas la... A la place il y avait une autre fille, qu'il trouvait clairement moins magnifique que le petit bout de femme, et qui le regardait étrangement. Il se regarda. En effet, ses fringues étaient elles aussi tachées de sang, et pas qu'un peu.
Noïd se surprit à regretter l'absence de sa camarade... Tch, il espérait quoi, de toute façon ? C'était une évidence qu'elle voulait mettre le plus de distance entre lui et elle, après tout, vu ce qu'il avait failli provoquer...
Les mains dans les poches, il avança, se mettant dans la direction du couloir obscur. Mais il s'immobilisa, entendant un bruit de pas.

- « ...Pourquoi j'ai envie que... Merde, qu'est ce qu'il va pas, avec moi ? », grommela Noïd.

Oui, il avait envie qu'elle revienne. Et lorsqu'il la vit, avec son air un peu... perdu , il ne put s'empêcher de sourire.
D'un sourire sincère, quoique un poil con. Noïd s'approcha d'elle à un moment ou elle ne le regardait pas, et l'attrapa doucement par l'épaule. Il savait même pas, avant de la rencontrer, qu'on pouvait attraper doucement quelqu'un par l'épaule.

- « T'inquiètes donc pas, je suis la. Dis donc, tu n'as pas l'air bien... Qu'est ce qu'il t’arrive ? »

Sincère. Et essayant même d'être gentil.
Pas commun. Vraiment pas commun.

Toujours en proie au doute, elle resta immobile un long moment avant qu'enfin Noïd la retrouve. Il l'a prit par l'épaule, ce qui la fit légèrement sursauter, elle était un peu à cran avec tout ce qui s'était passé aujourd'hui. Mais elle fut soulager de constater que c'était lui. Le voir la rassura immédiatement, ce qui n'aurait pas forcément été le cas une demi heure plus tôt.

"Ah, je te cherchais."

Elle allait enchaîner sur les sacs volés, mais se ravisa en voyant les pansements à la tête de Noïd. Elle se demandait s'il avait encore mal, elle supposa que oui. Peut-être valait-il mieux qu'il aille se reposer avant de de s'occuper de ça...

"Tu... Tu vas mieux ?"

Oui elle s'inquiétait vraiment pour lui, sinon elle ne l'aurait pas traîné jusqu'à l'infirmerie. Elle hésita à lui parler de cette histoire de sacs... Mais toute façon elle pourrait pas lui cacher bien longtemps, il s'en rendrait compte tôt ou tard...

"Euhm... Nos sacs... On les avaient laissés dans le couloir et..."

Elle essayait tant bien que mal de dire ça en douceur, de façon à ce qu'il ne s'énerve pas, c'était ce qu'elle redoutait le plus. Il ne fallait pas qu'il s'énerve, vu son état actuel.

"Bah ils y sont plus."

Bon. Finalement, elle y était allé un peu plus brusquement que ce qu'elle n'aurait voulut. Elle avait peur d'avoir été trop brusque et de l'avoir alarmé. Qu'il s'énerve de nouveau. Elle n'avait pas peur pour elle, mais surtout pour lui, et pour les autres aussi. Alors rapidement elle émit cette idée :

« On a qu 'à aller voir au bureau des surveillants, ils les ont peut-être retrouvés ! »

Sur ces bonnes paroles elle prit le chemin de ce fameux bureau, priant de toute son âme qu'elle retrouve toutes ses affaires. Ses cours de la journée étaient dedans, comment elle ferait pour rattraper la moitié d'une année de cours sur deux matières différentes ? D'autant plus qu'elle n'était pas super bien intégrée dans sa classe, elle se voyait mal demander ça à un de ses camarades...

Une chose était certaine, ils ne passaient pas inaperçus dans le couloirs. Encore une fois, ils étaient le centre de l'attention. En même temps vu les blessures de Noïd et leurs vêtements tâchés de sangs... Jimena en fut légèrement gênée. Elle qui passait son temps à vouloir être discrète, voilà qu'elle s'affichait avec un grand bourrin au physique pas comme les autres, blessé qui plus est. Elle tourna légèrement la tête vers lui pour l'observer discrètement, un physique comme elle n'en avait jamais vu, un physique qui lui plaisait... Très vite elle détourna les yeux. Elle était bête de penser ça maintenant.

Malgré tout elle ne pouvait s'empêcher d'avoir de l'affection pour lui. Il ne lui apportait que des ennuis pourtant elle était encore avec lui maintenant. Elle l'avait attendu à l'infirmerie, s'était et s’inquiétait toujours pour lui. De même, elle aurait pu s'en aller sans le prévenir pour son sac, il l'aurait bien remarqué seul de toute façon. Pourtant elle était revenu le chercher... Une fille normale comme elle ne l'aurait-elle pas fuit ? Trop gentille oui Jim' l'était, mais cela devait-il pourtant tout expliqué ?

Ils arrivaient enfin au bureau des surveillants. Jimena priait mentalement pour qu'ils soient la. En même temps elle se dit que si ses affaires étaient bien ici, elle n'aurait plus aucune raison de rester avec Noïd...

"Ah et tu me dois un lavage de vêtement..."

Elle lui montra le sang qui les tâchaient, en souriant un peu. Mais pourquoi, pourquoi faisait-elle ça ? Elle l'invitait à se revoir, déjà elle qui était timide c'était inhabituel, et puis même, elle ne s'attendait pas à ce que... Elle avait ... Enfin ... Toute façon maintenant c'était trop tard ! Elle ne voulait pas rester seule, encore. Et il ne devait plus rester seul non plus.

Le déchu mit quelques secondes à comprendre qu'elle parlait de ses blessures. Il se passa rapidement la main sur le front, lui faisant comprendre qu'il n'avait pas grand chose.

- « Oh, t'inquiètes pas, je ne sens plus rien. »

C'était à moitié vrai. Pour être exact, il était plus correct de dire qu'après ce qu'il avait pris quand l'infirmière l'avait soigné, il ne serait plus capable de considérer un coup de poing dans la gueule comme douloureux pendant au minimum une semaine. Faut dire que c'était certes très efficace, mais la méthode de soin de l'infirmière était pas pour les tafioles. Noïd fit un petit sourire, alors qu'il ébouriffait les cheveux de la jeune femme.
Mais elle ne semblait pas prête à se réjouir. La raison était simple... Ils venaient de se faire faucher leurs affaires, ou pour être plus précis, elles venaient de disparaître. Noïd fit la grimace.

- « Eh bah punaise, il y a vraiment des jours on a l'impression que tout va mal, hein ? Sauf que... »

Noïd s'interrompit, passablement choqué. S'il avait terminé sa phrase, il aurait dit « Sauf que je t'ai rencontré, donc la journée en soi était plutôt pas mal. » MAIS BON DIEU QU'EST CE QUI N'ALLAIT PAS, CHEZ LUI ? Depuis quand il balançait des phrases de ce genre à des personnes qu'il ne connaissait que peu ?
Depuis quand de toute manière, des personnes lui manquaient ? Il allait finir par croire qu'il avait une grave problème, la !

« On a qu 'à aller voir au bureau des surveillants, ils les ont peut-être retrouvés !

- « Je présume que l'on a rien à y perdre, ouais... », lâcha Noïd.

Le trajet vers la vie scolaire se passa sensiblement dans les mêmes conditions que celui vers l'infirmerie. Sauf que cette fois, Noïd était debout, et en pleine forme, ce qui faisait donc qu'il arrivait à faire fuir toute personne qui ne comprenait pas le sang que les deux avaient sur leurs vêtements.
Bon d'un autre côté, les couloirs étaient moins pleins. La raison était simple, l'heure du coucher obligatoire approchait, et tout élève surpris en dehors de sa chambre à cette heure-la risquait le pire. Tch, monde de merde.
Enfin, ils atteignirent rapidement la vie scolaire. C'est alors que la jeune femme lui dit.

"Ah et tu me dois un lavage de vêtement..."

Noïd sourit d'un air un peu piteux à Jimena. Vrai que pour la majorité des filles, leurs vêtements comptaient pas mal, et il venait quand même de bien salir ceux de Jimena. Ses partenaires de chambre allaient faire une drôle de tête en la voyant. Noïd se gratta la tête. Il ne pouvait pas le nier, il lui en devait une.

- « Bon bah heu... Promis, je viendrais ben heu... laver tes vêtements dans les prochains jours. C'est la moindre des choses que je peux faire pour toi. »

Putain, et pourquoi l'idée de la revoir lui plaisait tant que ça, merde ? D'accord, c'était la seule personne de ce lycée qui témoignait de la bienveillance envers lui, et en plus elle était super gentille, et en plus elle était extrêmement jol... STOOOOOOP ! Commence pas comme ça, Noïd, sinon tu vas vraiment finir par perdre pied.
Noïd, pour se donner une contenance, entra dans la vie scolaire, suivi par Jim. Il s'approcha d'un surveillant, qui le regardait , un peu décontenancé (rapport au sang).

- « Il y a eu un accrochage. Heureusement, il n'y a pas eu de blessés grave... Donc, on s'est fait faucher nos sacs en rejoignant l'infirmerie. Vous les auriez pas vu, par hasard ? »

Reprenant contenance, le surveillant réfléchit une seconde, puis alla dans l'arrière de la salle, ou deux sacs trônaient fièrement. Noïd ne mit qu'une seconde à les identifier. C'était bien les leurs.

- « Dans ce cas... prenez-les, et retournez dans vos chambres. On va vous accompagner, c'est bientôt l'heure du coucher obligatoire. »

Ah. Phoque. Il aurait voulu continuer à passer du temps avec Jimena... Noïd lui adressa un sourire d'excuse alors que le pion l'entraînait vers sa chambre, et qu'elle était escortée par une autre. Sans vraiment protester, il rejoignit sa chambre, et alla se coucher. La journée avait été éreintante. Il valait mieux pioncer.

***********************************************

Deux jours plus tard, Noïd patientait devant une salle de classe. Il avait demandé à la vie scolaire à quelle heure finissait Jimena, pour pouvoir la retrouver à la sortie de ses cours. La au moins, ils auraient davantage de temps pour eux.
Et il pourrait rembourser sa dette... Même s'il devait avouer que ce n'était absolument pas pour ça qu'il était revenu.

La veille, il avait cogité. Parce qu'il n'avait pas compris pourquoi durant toute la journée, il avait tiré la gueule, et pourquoi, contrairement à d'habitude... Il s'était senti seul. Et il lui avait fallu trois bonnes heures pour en comprendre la raison.
Elle l'attirait, il n'y avait pas d'autres mots. Il n'avait pas du la voir plus d'une heure, mais cette heure avait suffit pour que dès qu'elle parte, il se sente un peu mélancolique. Et vu qu'il ne comprenait pas pourquoi, il était énervé encore plus. Bref, lorsqu'il en avait finalement pris conscience, il s'était dit qu'il fallait qu'il aille la voir. Ne serait-ce que pour réaliser ce qu'il lui arrivait.
… Et aussi parce qu'il avait ATROCEMENT envie de la voir. Merde.

- « Jimena ! », appela Noïd en agitant la main doucement.

Quelque part, il avait peur qu'elle se barre. Qu'elle ne veuille pas passer de temps avec lui, surtout devant ses amies. Il n'avait pas bonne réputation dans ce lycée après tout...

- « Heu... Bah je te dois quelque chose, tu te souviens ? Donc heu... voilà, je suis la, si tu n'as rien de mieux à faire... »

Oui car avouer devant la foule qu'il était la pour laver ses fringues, ça sonnait un peu comme « Je vais te faire l'amour dans la blanchisserie », et il était bien loin de telles pensées.

«Bon bah heu... Promis, je viendrais ben heu... laver tes vêtements dans les prochains jours. C'est la moindre des choses que je peux faire pour toi.»

Dit comme ça, elle avait presque envie d'en rire. Elle voyait mal ce grand bonhomme plus bourrin que ménagère laver son linge. Mais bon, au moins, elle pourrait le revoir...

Puis arrivé au bureau des surveillants, il passa en premier, leur expliqua ce qu'il en était, et elle put découvrir avec joie que leurs sacs étaient ici. Ce fut un véritable soulagement pour elle. Et puis pour lui aussi, pas besoin de les rechercher, ou de s'énerver contre les voleurs... Mais la joie fut de courte durée, maintenant les surveillants envisageaient de les ramener jusque dans leurs chambre. Foutu couvre-feu. Elle ne pouvait rien dire, lui non plus d'ailleurs. Et puis non mais de toute façon c'était peut-être mieux comme ça, il fallait qu'il se repose après ce qu'il s'était passé... Un dernier sourire échangé et ils étaient partis.

De retour dans sa chambre elle se sentit soudain très fatiguée elle aussi. Elle se changea, mit ses affaires à tremper pour que le sang ne s'imprègne pas et alla se coucher, sans avoir mangé.

Deux jours plus tard.

Deux jours que tout ça s'était produit et elle tentait de l'oublier. Oublier les combats, la violence. Mais lui... L'albinos, Noïd, elle ne voulait pas l'oublier. Et depuis deux jours, elle regardait autour d'elle dans l'espoir de le croiser. Mais rien. Bon. Tant pis. Il avait certainement mieux à faire que de laver les vêtement d'une gamine...

Cours de math. Rendu d'une note. Catastrophique. Mais il fallait s'y attendre, c'était des maths après tout. Elle attendait impatiemment que la sonnerie retentisse. Elle rangeait déjà ses affaires. Et enfin elle sonna. Elle fut l'une des premières à sortir, relevant les yeux elle croisa le regard de Noïd qui venait de l'interpeller. Son coeur fit un bond, que faisait-il ici ? Comment savait-il qu'elle serait là ? Elle ne put s'empêcher de sourire, un grand sourire un peu niais.

Elle s'approcha rapidement de lui. Ainsi donc il était venu pour ses vêtements. Finalement c'était un homme de paroles. Elle hocha la tête, tout sourire.

"Tu tiens parole, c'est bien !"

Elle prit la direction de sa chambre. Oublié la mauvaise note. Elle reprit:

"Ca va mieux tes blessures ?"

Journée de cours terminée, et elle retrouvait la compagnie de Noïd. Elle ne savait pas trop pourquoi ça lui faisait autant plaisir, mais elle n'avait pas trop envie d'y penser non plus. Elle s'affichait au côté de Noïd dans le lycée, et elle s'en fichait éperdument, ça leurs passerait de toute façon.

"Eh, comment t'as fait pour me retrouver ?"

Elle tourna un regard suspicieux vers lui. Avait-il eut beaucoup de chance ou l'avait-il réellement cherchée ? L'avait-il cherchée uniquement pour payer sa dette ? Elle espérait que non, parce que ce qu'elle ne lui avait pas encore dit... C'est qu'elle avait déjà lavé ses vêtements. Elle ne pouvait pas l'attendre, sinon ils auraient été foutue. Et maintenant qu'elle y pensais... Ca faisait pas bizarre si elle l'invitait dans sa chambre, alors qu'il n'a "plus rien à y faire" ? Elle rosit un peu, inviter un garçon tout court c'était bizarre ! Alors elle se stoppa net et le regarda.

"Euh, mes vêtements je les ais déjà lavés en fait. Parce que si je t'avais attendu, ça serait pas partit. Désolée..."

Elle ne disait pas ça méchamment, ni avec aucune rancune, c'était simplement la vérité.

… Mais merde, c'était quoi cette situation ? Pourquoi il avait fallu que cette tension qu'il accumulait depuis deux jours sans en comprendre la raison s'évapore dès qu'elle lui sourit ? Bon, ou cette fille avait un pouvoir qu'il ne parvenait pas à comprendre, ou bien... Ouais, il n'arrivait même pas à formuler la seconde possibilité en fait. Noïd lui rendit son sourire, un peu plus crispé néanmoins, n'étant pour ainsi dire pas franchement habitué à ce genre d'exercices.
Il la suivit vers sa chambre, jetant au passage un regard noir à une personne qui les dévisageait d'un air éberlué (ce qui provoqua son repli stratégique vers la salle de classe).

"Ca va mieux tes blessures ?"

Il lui fallut deux bonnes secondes pour comprendre ce à quoi elle faisait référence. Il fallait dire que sensiblement trois jours sur cinq, il affichait un beau pansement, ou alors un hématome, donc la notion de « blessures », était assez abstraite pour lui. Néanmoins, pour elle, il fallait admettre qu'assister à la mise en morceaux d'une autre personne avait du être une expérience traumatisante. Noïd effleura le pansement qu'il avait sur la joue. Il ne ressentait plus grand chose, à l'heure actuelle.

- « Oh, t'inquiètes, je sens plus rien. Je pourrais aller castagner une demi-douzaine de démons sans même être essoufflé, pour te dire. »

A croire que son tact et son élégance revenaient à la charge. Crétin, tu t'es pas rappelé qu'elle avait HORREUR des combats ? En proie à une soudaine frayeur, il se demanda comment se sortir de cette situation. Néanmoins, par un heureux coup de bol, ce fut Jimena elle-même qui lui posa une nouvelle question, sur laquelle il embraya aussitôt :

- « Heu... Bah je suis allé demander à la Vie Scolaire a quelle heure tu finissais les cours, comme ça, j'ai pu te trouver sans trop de problèmes. »

Ouais, d'une certaine manière, ça faisait un peu « stalker », surtout qu'il avait du froncer les sourcils pour que les surveillants acceptent de fouiller dans leur base de données pour en extirper l'emploi du temps de mademoiselle Jewel. Bon, il avait aussi fallu qu'il les convainque qu'il ne voulait aucun mal à ce brin de femme, et ça, ça avait pris un peu plus de temps.
Comme s'il se sentait de la cogner...
Ce fut sensiblement à ce moment qu'elle se rendit compte que c'était vers la chambre d'une fille qu'il se dirigeait. …Oops. La même pensée du traverser Jimena car à la même seconde, la jeune femme pila net. Du coup, Noïd la percuta très légèrement. Il fit un bref signe d'excuse.

"Euh, mes vêtements je les ais déjà lavés en fait. Parce que si je t'avais attendu, ça serait pas partit. Désolée..."

Noïd fit la grimace. C'est vrai qu'il n'y connaissait pas grand chose dans l'art de la lessive, ne s'en étant jamais préoccupé. L'ange aux cheveux blancs passa nerveusement sa main dans sa masse touffue de cheveux, se demandant comment il allait devoir faire pour payer sa dette.

- « … Tch, bah du coup, je te dois quand même un lavage. Heu... un lavage de vêtements. »

Précision utile. Il n'y avait plus qu'à espérer que Jimena ne relèverait pas, car même si c'était pas son genre de faire ce type de blague, la, il s'emmêlait grandement les pinceaux. Dans une brillante tentative pour ne pas regarder la réalité en face, Noïd se mit à dévisager avec attention le plafond. Puis, se rendant compte qu'il était assez pitoyable, il fallait l'avouer, il reporta son attention sur Jimena, un léger sourire sur ses lèvres.

- « … Eh bien zut, maintenant, tu m'as grillé l'excuse que j'avais pour venir te voir. Du coup, on continue, ou bien tu préfères t'arrêter maintenant ? En attendant que j'en trouve une nouvelle ? »

Il y a des moments dans la vie ou l'on souhaite foncer, et en l’occurrence, Noïd en avait un peu marre de trop réfléchir. Il restait à voir si la jeune fille partageait ses pensées ou pas. De toute manière, il ne regrettait rien, concernant son comportement vis-à-vis d'elle.

« Oh, t'inquiètes, je sens plus rien. Je pourrais aller castagner une demi-douzaine de démons sans même être essoufflé, pour te dire. »

... Bah, il était clair qu'elle ne le changerait pas hein... C'était une partie de lui qu'elle devait accepter, même si elle ne le cautionnait pas. Et même si elle ne pourrait probablement pas s'empêcher de l'engueuler s'il recommençait devant elle. Elle décida toutefois de ne pas se formaliser sur ce qu'il venait de dire. Après tout, il avait juste dit ça pour lui faire comprendre qu'il allait bien.

Il était tout de même aller demander son emploi du temps à la vie scolaire. Et en principe, ils ne le donnaient pas vraiment comme ça, sans aucune raison, encore moins pour tenir la promesse de lui laver ses vêtements. Et bien... Soit il était un homme de parole, soit... Soit quoi ? Soit rien du tout. Y'avait pas d'autres possibilités. Il n'était pas revenu pour elle. Elle s'agaçait toute seule à penser des choses comme ça. Bref.

A son annonce pour ses vêtements, Noïd grimaça. Immédiatement elle se mit à penser qu'elle avait mal fait. Il pensait peut-être s'être donné autant de mal pour la retrouver pour rien, que c'était une perte de temps. Et c'était pas faux. Elle s'en voulut. Puis il enchaîna sur le fait qu'il lui devait toujours un lavage. De vêtement. Bah oui, de quoi d'autres sinon ? Puis il se mit à fixer le plafond. Jim' suivit un instant son regard pour voir ce qu'il pouvait bien y trouver... Mais n'y trouva rien, alors finit par baisser les yeux. Elle resta silencieuse. Que pouvait-elle dire ? Puis il reposa son regard sur elle, un léger sourire peint sur ses lèvres.

« … Eh bien zut, maintenant, tu m'as grillé l'excuse que j'avais pour venir te voir. Du coup, on continue, ou bien tu préfères t'arrêter maintenant ? En attendant que j'en trouve une nouvelle ? »

...
...
...

Jimena lâcha un rire nerveux. Non, impossible, il n'était pas venu pour elle tout de même. Mensonge. Pourquoi il faisait ça ? Non, pourquoi elle pensait ça ? Pourquoi elle ne le croyait pas ? Il n'avait aucune raison de mentir. Elle était gênée de sa réaction, elle se sentait juste stupide.

"Excuse-moi... Je suis vraiment désolée, je voulais pas rire bêtement comme ça. C'est... J'ai du mal à me dire que tu puisses être venue pour me voir..."

Elle ne savait plus ou se mettre, ne savait plus quoi dire, comment réagir, en bonne petite paumée, elle avait envie de craquer. Comment pouvait-on s'intéresser à elle une seule seconde ? Non, pas possible. Imbécile. Elle repensa à Adam, à Lazarus. Mizore aussi à sa façon. Toutes les trois s'étaient intéressés à elle, au moins un peu. Alors pourquoi là, ça lui semblait si improbable ?

« Mais, euh... Je veux bien continuer hein. Je veux dire, enfin... Ca me dérange pas d'être avec toi, au contraire. »

Sourire timide. Mais toujours sincère. Ce qui l'étonnait peut-être c'était qu'un gars comme lui puisse vouloir la voir. A bien y réfléchir il lui avait dit qu'il restait souvent seul... En tout cas, cela lui faisait plaisir de savoir qu'il n'était pas venu là uniquement pour tenir sa promesse. En fait il était plutôt gentil avec elle. Et... Oh non pas lui... Ce type au bout du couloir, c'était bien le gars qui avait frappé Noïd ? Elle en était presque certaine. Il était HORS DE QUESTION qu'une nouvelle bagarre éclate.Hors de question donc que Noïd croise son regard. Très vite elle lui attrapa le bras doucement, et le tira un peu.

"Viens on va sortir prendre l'air, j'en ai besoin !"

Elle le regardait dans les yeux pour capter son regard, il ne fallait pas qu'il tourne la tête. Elle marchait donc à reculons et espérait ne rentrer dans personne. Puis elle l'attira dans les escaliers ou là, elle put se mettre à côté de lui. Elle espérait simplement qu'il ne se poserait pas trop de question sur cette réaction bizarre. Puis elle finit par lâcher son bras, arriver en bas des escaliers. Elle regardait droit devant elle, toute gênée. Cette proximité si soudaine, si elle n'avait pas paniqué, jamais elle n'aurait osé faire une telle chose. Elle avança un peu plus vite que lui pour sortir et l'attendre dehors, à l'air frais, histoire de calmer les battements de son coeur. Elle avait évité une catastrophe...

Il s'était attendu à une tripotée de réaction. Mais pas à ce qu'elle rigole. Enfin, ça semblait plus être nerveux qu'autre chose, comme rire, aussi Noïd choisit de ne pas se formaliser, et de se contenter de soutenir avec attention son regard.
Ainsi, elle avait même du mal à considérer qu'il était venue pour la voir elle. Et pas une autre. Noïd se passa la main dans les cheveux. Phoque, il était censé répondre quoi, la ? Elle avait si peu confiance en elle ?

- « Desserres les dents, ma belle... C'est pour toi et pour personne d'autre que je suis venue, pas besoin de te mettre dans ces états la pour ça. »

Ou comment passer pour plus sûr de soi qu'on ne l'est en réalité. Bon, d'un autre côté, c'était son naturel qui revenait au galop, et ça, il ne pouvait pas vraiment le contrôler.
Le problème était que lui même, il ne savait pas pourquoi il avait eu envie de la voir. D'habitude, les gens comme elle avaient tendance à l'horripiler. Mais la non seulement elle ne l'énervait pas du tout... MAIS EN PLUS IL EN REDEMANDAIT ! Un truc tournait pas rond chez lui. Mais bon, tant que ça leur faisait un plaisir commun de se voir, c'était le plus important.

« Mais, euh... Je veux bien continuer hein. Je veux dire, enfin... Ca me dérange pas d'être avec toi, au contraire. »

L'ange aux cheveux blancs retint un léger sourire, alors qu'elle lui souriait, d'un timide, mais réconfortant, sourire. Putain, ce qu'elle était jolie.
A croire qu'il lui avait fallu tous ce temps pour se rendre compte de cela. Et lui... Il lui avait fallu une journée complète de réflexion pour admettre qu'il ne détestait pas les moments qu'ils passaient ensemble, même s'ils étaient pour le moment, bien restreints. Et une fois qu'il avait compris que ces moments la lui manquaient, il avait décidé d'aller la revoir.
Il y a des moments ou même lui avait tendance à faire compliqué quand c'était simple. Quand tu as envie d'être avec quelqu'un... Tu as juste à aller le voir. Il s'apprêtait à lui dire ça, pour la motiver et lui donner confiance, mais il pila net, en voyant l'expression de Jimena.
De... la peur ou de la stupéfaction ? Avant qu'il ne comprenne quoi que ce soit, elle lui avait saisit le bras et l'avait entraîné dans l'escalier.

- « Jimena ? Mais... Heu... »

La suite le fit fermer sa gueule.
Il se retrouva plaqué contre le mur de l'escalier, avec Jimena a une distance qui s'était énormément, mais genre énormément réduite. Au point qu'elle était dans son périmètre de sécurité sans qu'il n'y trouve à redire. Elle ne le regardait pas vraiment.
Mais elle se tenait juste à côté... Enfin, juste en face de lui. Au point qu'il sentait son souffle chaud lui envelopper la gorge, qu'il sentait une très légère trace de rouge lui monter aux joues, tandis que sa respiration se réchauffait elle aussi. Putain, il était en train de lui arriver quoi la ? Ce sentiment... ne lui était pas totalement inconnu, mais pour une raison qui lui échappait, il n'arrivait pas à mettre un nom dessus.
Mais elle s'écarte de lui, pour qu'ils finissent par descendre l'escalier. Elle ne semblait pas avoir franchement conscience de ce qu'il venait de se passer. Noïd secoua les cheveux pour reprendre contenance. Par contre, elle, elle était gênée.

- « Hum... Dis, ça t'arrive souvent de plaquer les garçons innocents contre les murs, comme ça ? Non pas que ça m'ait déplu, mais... Je m'y attendais pas voilà tout. En voilà, une petite entreprenante ! »

Ouais, enfin, en l'occurrence, c'était plus une manière de gérer la situation qu'autre chose. Il faut dire qu'il avait beau faire le fier... Il n'en menait pas franchement. Et "innocent" lui convenait pas, après réflexion.

« Desserres les dents, ma belle... C'est pour toi et pour personne d'autre que je suis venue, pas besoin de te mettre dans ces états la pour ça. »


Sa façon de parler n'était pas des plus jolies, mais ça avait le mérite d'être clair. Jimena ne put s'empêcher de s'empourprer légèrement, même si cette réponse avait aussi quelque chose de blessant. "Pas besoin de se mettre dans ces états la pour ça", non en effet, mais Jim' était comme ça, à paniquer pour un rien, décontenancé pour pas grand chose, devant n'importe qui, même une fille avec un minimum de prestance pouvait la déstabiliser. Aucune confiance en elle. Il la mettait face à sa propre faiblesse. Sans le savoir bien sûr. Mais pour Jim' ça sonnait presque comme... Une moquerie. Ca n'en était pas une, enfin elle ne le pensais pas... Alors elle passa outre. De toute façon elle avait mieux à penser, et mieux à faire aussi.

Jimena n'avait constaté qu'après-coup sa façon d'agir. Mettre de la distance entre elle et lui maintenant, pour... Compenser. Et surtout pour reprendre une certaine contenance. Espérant qu'il n'ait pas réellement remarqué. Remarqué à quelle point elle avait été proche de lui à un certain moment. Comment n'avait-elle pas pu remarquer ça elle-même ? Et sur le moment ? Elle avait paniqué. Et avait agit sans réfléchir. Le vent frais du dehors la calma légèrement, et puis elle avait prit assez d'avance pour que sa gêne disparaisse le temps qu'il la rattrape. Une fois rejoint il prit la parole, et finalement tout ce qu'elle avait fait pour se calmer vola en éclats:

"Hum... Dis, ça t'arrive souvent de plaquer les garçons innocents contre les murs, comme ça ?"

Innocent vraiment ? Lui ? Elle émettait de sérieux doutes la dessus.

"Non pas que ça m'ait déplu, mais..."

... Pardon ?

"Je m'y attendais pas voilà tout."

Oui elle non plus. Ses joues reprirent quelques couleurs qu'elle se mettait à haïr aussitôt.

"En voilà, une petite entreprenante !"

Mais non pas du tout ! C'est pas ça du tout ! Il ne pouvait pas penser ça d'elle, elle n'était pas comme ça ! Affreusement gênée et paniquée elle lâcha :

"Mais non j'ai juste paniqué et j'ai pas... Réfléchit..."

Juste comme maintenant. Paniqué, pas réfléchit, elle en avait trop dit. Elle lui tourna le dos et se remit à marcher. Bon sang ce qu'elle pouvait être conne ! Espérant encore qu'il ne remarquerait rien, ou qu'il ne se poserait pas trop de questions, elle continua à s'auto-flageller mentalement pendant un petit moment. Elle en avait marre de toujours rougir pour un rien, de ne pas pouvoir supporter le regard de n'importe qui plus de trois secondes ! Elle était persuadée que si là, elle se retournait pour le regarder, elle se remettrait à rougir et à bégayer comme une collégienne à son premier rendez-vous. Rendez-vous. Ca n'en était pas vraiment un hein ? Pourquoi est ce qu'il s'intéressait à elle... Pourquoi... Etait-il venu pour elle ? Qu'est ce qui l'intéressait chez elle ? Probablement pas tout ça, son manque d'assurance à outrance, ses rougissements, tout ça devait être déplaisant, agaçant finalement. Elle n'énervait elle-même d'être ainsi. Il n'y avait que lorsque la situation devenait grave ou que son côté sorcière ressortait plus (ce qui allait souvent de pair) qu'elle pouvait agir de façon déterminée. Enfin.... Là, la situation n'avait pas été grave en soi, mais aurait pu le devenir. Elle était certaine qu'elle aurait pu agir autrement. Et tout ça ne serait pas arrivé.

Elle finit par prendre son courage à deux mains et se retourner de nouveau vers lui, sans vraiment trop le regarder, tentant plutôt de poser son regard sur les alentours.

"Hum je sais pas trop ou tu veux qu'on aille..."

.... Faux. Ou ELLE voulait aller. Elle était sortit rapidement mais sans but précis. Seulement il n'avait jamais demandé à sortir lui. si ça se trouve il voulait même pas. Elle soupira. Mais qu'est ce qu'elle faisait... Il fallait qu'elle arrête de trop réfléchir, de penser. Respirer et se calmer. Parler à un garçon, ça devait pas être si compliqué.

"Enfin je veux dire... Je t'ai fait sortir mais tu ne voulais peut-être pas."

Son regard... Elle venait de le croiser. Yeux rouges qu'elle avait vu en colère, triste, souvent désabusés. Elle avait maintenant la vague impression d'y voir autre chose. Un peu comme... De la tendresse. Ses traits semblaient moins dur aussi. Sentant qu'elle le fixait un peu plus longtemps que prévu elle détourna la tête faisant mine de regarder un autre élève passé. Elle n'avait pas remarqué à quel point son coeur battait en le voyant comme ça.

Pour la première fois depuis longtemps, Noïd s'en voulut. Et il s'en voulut de s'en vouloir. Avant de se rendre compte que sa logique était complètement conne, et d'auto-administrer une gifle mentale afin de redevenir maître de sa pensée. Il s'était rendu compte qu'il l'avait blessé avec sa remarque, et ça, il le regrettait. Jimena n'appartenait pas au même monde que lui, et une remarque qu'il aurait considéré comme anodine pouvait au contraire attaquer la jeune fille aussi sûrement qu'un coup de couteau psychique.
Il envisagea de s'excuser. Mais il ne réussit pas à faire passer la barrière de ses lèvres à des mots qui auraient pu la réconforter. S'excuser pour ce qu'il était, pour l'avoir blessée... Il n'y parvenait pas. Pas cette fois. Pas à elle. Et encore une fois, il ne se comprenait pas. Ce n'était que des mots. Alors qu'est ce qui l'empêchait de prononcer ces simples paroles ? Leur contenu ? Ou alors la personne à qui il voulait les dire ? Depuis qu'il l'avait rencontré, il ne parvenait plus à être autant fidèle à lui-même qu'il le souhaitait. Putain, qu'est-ce qui lui arrivait ?

- « ... »

Et il l'avait mise mal à l'aise avec sa tentative pour rester le garçon froid et imperturbable. Punaise, mais qu'est-ce qui n'allait pas avec lui ? C'était évident qu'elle allait réagir comme ça, et cela, il le savait pertinemment ! Tch, bon, maintenant... Il allait falloir qu'il la calme, car sinon, ils n'étaient pas rendu. Et surtout, bien qu'elle était mignonne lorsqu'elle se prenait la tête comme ça... Il n'avait pas envie de la voir se torturer pour des broutilles. Il ouvrit la bouche pour tenter de parler, mais pour une fois, ce fut lui qui n'eut pas le temps.

"Hum je sais pas trop ou tu veux qu'on aille..."

Noïd referma la bouche. C'était une bonne question à vrai dire. Enfin, plutôt, ça aurait pu être une bonne question. Car en effet, il prenait conscience que le plus important pour lui n'était pas ou il était, mais avec qui il se trouvait. Et en l'actuel instant, il savait pertinemment que la présence de Jimena lui suffisait amplement.
Noïd lui sourit. A pleine dents, cette fois. Cette phrase, il souhaitait lui dire.

- « Franchement, j'irai ou tu voudras. Tant que c'est la ou toi, tu veux aller... Phoque, c'est si compliqué que ça de dire que c'est ta présence qui m'importe ? »

… Ouais, encore une fois, il n'arrivait pas à verbaliser clairement ce qu'il voulait dire. Mais il espérait que cette fois, il avait réussi à lui dire clairement ce qu'il voulait exprimer. Mais alors qu'il se disait cela, une autre pensée lui vint en tête.
Les mots n'avaient jamais été son fort, mais lorsqu'il n'arrivait pas à parler, il avait une autre manière de communiquer. Noïd attrapa Jimena par l'épaule, et l'entraîna dans un coin abandonné. La ou ils n'étaient que tous les deux. Même si ça n'allait pas durer.
Et maintenant qu'il avait la sensation que c'était un face à face, il laissa parler son corps, et ses envies. C'est pour ça qu'il s'autorisa à faire glisser la main qui tenait l'épaule de Jimena vers sa taille, la ou elle fut rejointe par l'autre. Tout simplement pour la serrer contre lui. Dans une étreinte douce, comble pour lui.

Et comme tout à l'heure, il la sentit contre lui. Beaucoup plus proche, cette fois. Il sentait son cœur battre, à un rythme au moins aussi rapide que le sien. Il sentait son souffle, son odeur, sa chaleur. Punaise, il était en train de perdre les pédales. Trop d'informations sensorielles d'un seul coup, envers quelqu'un qui y était hyper sensible.
Alors il se baissa un peu, pour chuchoter à son oreille :

- « Pour me faire pardonner de t'avoir blessé... Je vais te révéler un secret, d'accord ? Un truc que je veux que tu saches...Concernant ce que je suis en réalité. »

Une légère concentration. Une aura lumineuse qui l'envahit, alors qu'une paire d'un blanc cassé apparaissaient dans son dos. Noïd laissa échapper un petit sourire, alors qu'il serra un peu plus fort Jimena contre lui. Et qu'il s'envola. Jimena contre lui, il s'attarda un peu plus que ce qui était raisonnable dans le ciel. Pour qu'elle profite du paysage, avant qu'il se pose doucement sur le toit. La ou ils ne seraient dérangé par personne. Noïd desserra l'étreinte de ses bras, qu'elle puisse se libérer si elle le désire. Mais de lui-même, il ne rompit pas l'étreinte pour autant.

- « Désolé de t'avoir emmené ici sans prévenir. Je voulais juste être seul avec toi... Qu'on arrête d'être dérangé par tout ce qui bouge... Mais voilà. C'est ce que je suis. Un ange déchu, qui s'est cassé du ciel par pur égoïsme, acceptant en contre-partie de perdre mes pouvoirs, et de ne plus être éternel. »

Noïd afficha un large sourire avant de lui sortir :

« Franchement, j'irai ou tu voudras. Tant que c'est la ou toi, tu veux aller... Phoque, c'est si compliqué que ça de dire que c'est ta présence qui m'importe ? »

Non mais il faisait quoi là, pourquoi il lui disait des trucs pareil ? Il... Se jouait d'elle ou il le pensait vraiment ? Sa réaction ne se fit pas attendre, le rouge lui montait déjà aux joues alors qu'elle tentait de se convaincre que c'était rien. Mais que pouvait-elle bien répondre à ce genre de déclaration ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Et préféra gardé le silence, de toute façon son corps parlait pour elle. Et de toute façon il la prit par l'épaule pour l'emmener plus loin. Elle se demanda un instant si lui aussi avait vu le gars de la dernière fois et que peut-être c'était pour ça qu'il l'embarquait plus loin. Mais pas du tout en fait. Elle ne s'attendait probablement pas à ça du tout.

Sa main glissa de son épaule jusque sa taille, une ribambelle de pensées se mirent à défiler dans sa tête. Qu'est ce qu'il faisait, à quoi il jouait ? Pourquoi elle ? Pourquoi ici, maintenant, qu'est ce qu'il comptait faire ensuite ? Pourquoi est ce qu'elle ne le repoussait, pourquoi elle trouvait ça presque agréable ? Cette dernière pensé lui fit presque peur, mais elle n'eut pas le temps d'y penser plus longtemps, sa seconde main avait elle aussi glissé vers sa taille, elle se retrouva de nouveau contre lui, mais cette fois-ci elle en avait conscience, lui aussi, et c'était volontaire. Une étreinte qui pour une raison inexpliqué elle ne refusa pas. En y repensant personne ne l'avait prit dans ses bras ainsi depuis des lustres. Mais la c'était Noïd, un garçon qu'elle connaissait depuis à peine deux jours. Putain son coeur battait vite, trop vite !

« Pour me faire pardonner de t'avoir blessé... Je vais te révéler un secret, d'accord ? Un truc que je veux que tu saches...Concernant ce que je suis en réalité. »

Un secret ? Pour se faire pardonner ? Mais de quoi parlait-il ? C'était elle qui avait l'esprit embrumé à cause de l'étreinte ou c'était parce que... Une étrange lumière suivit de deux pairs d'ailes dans le dos, Jimena ouvrit grand les yeux, n'osant y croire. Elle n'avait jamais vu ça de sa vie, et elle le voyait de si prêt maintenant. Alors les anges existaient réellement ? ... Ils étaient plus agressifs qu'on ne le pensait alors... Puis soudainement il décolla. Jimena avait vu les ailes mais ne pensait pas une seule seconde qu'il allait s'envoler, encore moins avec elle dans ses bras. Il avait beau la maintenir contre lui, elle s'accrocha à son tour à lui. Jamais elle n'avait volé comme ça, c'était une sensation plutôt étrange. Ou alors c'était parce qu'elle l'enlaçait comme ça. Il n'allait pas la lâcher hein ?

Ils finirent par se poser sur le toit doucement et Jimena ne le lâcha que lorsqu'elle fut certaine d'être revenu sur le sol. Et tout doucement elle se détacha de lui, elle devait être rouge pivoine et mourrait de honte. Elle regarda à droite à gauche, le toit du lycée, aucune fuite possible pour se cacher. Bon, lui faire face, essayer de faire bonne mesure.

« Désolé de t'avoir emmené ici sans prévenir. Je voulais juste être seul avec toi... Qu'on arrête d'être dérangé par tout ce qui bouge... Mais voilà. C'est ce que je suis. Un ange déchu, qui s'est cassé du ciel par pur égoïsme, acceptant en contre-partie de perdre mes pouvoirs, et de ne plus être éternel. »

Trop d'information. Pause. Elle passa rapidement sur le fait qu'il veuille rester seule avec elle et se concentra sur la suite de son discours. Un ange certes, mais un ange déchu. Ceci expliquait probablement cela. Et à l'entendre c'était lui qui était parti. C'était un choix délibéré. Comment était-ce possible ? Elle ne connaissait évidemment pas leurs monde, mais elle s'imaginait mal le fait qu'on veuille quitter le monde des anges. Et puis... et puis... Pourquoi il lui disait tout ça ? Pourquoi il avait voulu qu'elle sache ? Pourquoi elle ? De nouveau elle regarda autour d'elle. Non, bien sur, aucun nouveau point de fuite à l'horizon. Point de fuite non pas parce qu'elle avait peur de lui, mais parce qu'elle ne savait pas comment se positionner face à lui qui venait de l'enlacer, face à lui qui venait de lui avouer ce qu'il était. Pauvre petite Jim' déboussolée.

"Euh je... Euh.. Je sais pas quoi te dire..."

Elle n'avait rien à lui avouer en contre-partie, rien à lui dire. Quelque part elle lui en était reconnaissante de lui avoir donné tant d'importance, elle petite sorcière, et de lui avoir dit ça. Et elle ne savait pas comment lui dire, comment lui faire comprendre que ce qu'il venait de faire avait de l'importance pour elle. Comment formuler ça dans une phrase, quels mots utiliser, comment, dans quel ordre. Bordel ce que c'était difficile de se faire comprendre !

"Je suis contente que tu m'ait montré ça... Et merci pour le... Vole"

Elle finit par sourire. Se détendre, voilà. Maintenant que la distance était rétablit entre eux elle pouvait... Elle pouvait... Se calmer. Mais rien que d'y penser ça la troublait. Sauf qu'elle pourrait pas oublier. Bon, penser à autre chose, s'occuper l'esprit. Penser à autre chose.

"Hum, Noïd ? Pourquoi... Pourquoi être parti de chez les anges ?"

Lancer un sujet de conversation, ou plutôt le continuer, ça c'était bien. Si toutefois il souhaitait répondre.

"Enfin si tu veux pas répondre libre à toi..."

Elle espérait cela dit qu'il accepte car Jimena était assez curieuse d'en savoir plus sur lui, qui il était exactement. Le vent se mit à souffler une légère brise, elle croisa les bras contre elle pour ne pas le laisser entrer. Elle tentait de soutenir son regard le plus assurément possible. Et arrêter d'être gênée pour un rien. Elle avait conscience que ça pouvait mettre mal à l'aise son interlocuteur à la longue. Puis une pensée lui vint soudainement en mémoire comme ça, et sans vraiment le vouloir, elle la verbalisa :

"Eh finalement c'est toi qui est plus entreprenant !"

Elle sentait déjà ses joues reprendre des couleurs, bon tant pis, peut-être qu'il n'y remarquerai pas, ou il pourrait peut-être penser que... C'était le soleil !

Elle ne refusa pas son étreinte. Quelque part, il en était heureux, car ainsi, elle ne refusait pas le seul moyen de communication clair qu'avec Noïd à sa disposition. Et surtout, il n'y avait qu'avec elle qu'il avait envie d'être clair comme ça. D'habitude, il se foutait totalement de si ses paroles étaient mal interprétées, et si elles blessaient les gens. Mais là, il ne voulait pas. Il ne voulait surtout pas, par sa crétinerie aiguë, blesser Jimena. Alors il ne lui restait que les gestes, pour communiquer.
En plus de ça... Il ne s'était tout simplement pas attendu à sentir son corps réagir aussi fort. Son cœur battait beaucoup trop vite, de même que celui de Jimena, qu'il sentait. Daphoque, mais qu'est ce qui leur arrivait ?
Et c'est pourquoi, quand elle recula, il se sentit presque triste. Ce sentiment était trop neuf pour qu'il le laisse partir sans émotions. Émotions's qu'il essaya de cacher... Au sens ou il tira juste la gueule, quoi.

"Euh je... Euh.. Je sais pas quoi te dire..."

Noïd étouffa un sourire. Venant de Jimena, cette réaction était logique. Il venait de l'enlacer, de l'emmener dans le ciel pour un vol bref, mais intense... Et il terminait en disant qu'il faisait parti des rares anges déchus présent dans le monde.
N'importe qui se sentirait déboussolé. Et Jimena, en plus de cela, était facilement déboussolé, surtout quand des garçons étaient dans les parages.
Mais elle se reprit vite et... le remercia ? Noïd sourit. Franchement, cette fois. Elle était vraiment mignonne, quand elle le voulait.

"Hum, Noïd ? Pourquoi... Pourquoi être parti de chez les anges ? Enfin si tu veux pas répondre libre à toi..."

Noïd leva le regard. C'est vrai que... Vu ce qu'il venait de lui dire, elle devait se poser des questions. Il n'était aucunement gêné de parler de son passé, à vrai dire... Mais il craignait surtout qu'elle soit choquée, il n'avait pas vraiment un passé facile à vrai dire...
Mais d'un autre côté, il ne connaissait pas son passé à elle, et il était bien possible qu'elle ait aussi vécu des moments difficiles. L'ange aux cheveux blancs esquissa un sourire.

- « Entreprenant...moi ? Hum, c'est surtout avec les personnes que j'apprécie beaucoup que je me permet ce genre de comportement. Oooh, zut, je viens de révéler que je t'appréciais beaucoup ! »

Hum... la, il la taquinait. Gentiment, mais il la taquinait. Au sens ou il l'appréciait tellement que s'il n'avait pas eu ce contrôle de lui-même, il lui aurait sauté dessus pour la reprendre dans ses bras, tellement le contact qu'ils avaient eu lui manquait. Mais au lieu de cela, il s'accouda sur un mur du toit, et commença son récit.

- « Je suis un ange déchu... Ça veut dire que je suis un ange qui a choisit de partir du ciel, en l'échange du renoncement à une grande partie de mes pouvoirs, ainsi qu'à mon immortalité. On ne dirait pas en me voyant, Jimena... Mais j'ai environ cent ans. »

Noïd fit une pause, et se regarda... Ouais, on ne dirait pas qu'il avait passé cent ans dans les cieux.

- « Mais... Mon corps a dix-neuf ans. C'est à dire que j'ai maintenant la même espérance de vie qu'un humain normal, si tu préfères. Mais pour en revenir mon histoire... Grosso modo, j'ai toujours été un rebelle. La mission des anges est de protéger les humains... Et pas besoin de bien me connaître pour comprendre que ça m'ennuyait. Je faisais mon travail de manière un peu... virulente, et je me faisais... Torturer pour ça, car je ne rentrais jamais dans les rangs. C'est la loi chez les anges. »

Le système qu'ils avaient trouvé au Paradis était simple... Les anges rebelles se faisaient progressivement sceller leur pouvoir, jusqu'à en avoir de moins en moins, sachant que chaque scellage s'accompagnait d'une vive douleur. Excellente manière de garder les anges sous leur contrôle. Manque de bol sur lui, ça n'avait pas marché.

- « … Je n'avais qu'une seule amie. L'ange qui m'avait formée. Et elle me couvrait quand elle le pouvait. Sauf qu'un jour, voyant que je ne rentrais pas dans le rang... Ils ont tenté de me tuer, si j'ose dire. Et comme elle s'y est opposée... Ils s'en sont pris à elle. »

Noïd serra les poings à ce souvenir. C'était à cause de lui que toute cette histoire avait commencé, cela il devait l'admettre.

- « Alors j'ai pris ma décision. Au Paradis, je ne serait jamais heureux... Et elle payerait pour toujours les pots cassés pour moi. Donc j'ai pris la décision de partir... Et de vivre ce qui me resterait de ma courte vie libre. »

Noïd fit une pause théâtrale. Il préférait largement cette vie à son ancienne. La liberté était une chose qui n'avait pas de prix.

- « Mais je ne regrette pas... Si j'étais pas parti, j'aurais jamais pu te rencontrer par exemple, nan ? Rien que ça, ça me fait dire que ça vaut le coup. Mais... Maintenant à ton tour, si tu le veux bien. Est-ce que tu veux me raconter un bout de ta vie, toi aussi ? »

Il était quand même curieux. Quel genre de vie ce petit bout de femme avait pu rencontrer avant qu'il ne la connaisse ?